La solution contre le vieillissement prématuré de l’électroménager ?

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Ilse De Witte Journaliste chez Trends Magazine

Les appareils électroménagers vieillissent beaucoup plus rapidement qu’avant. La garantie prolongée permet-elle de se prémunir contre ce phénomène ? Existe-t-il des solutions plus intéressantes ?

Les grandes chaînes d’électroménager demandent désormais systématiquement aux clients s’ils souhaitent assortir l’achat de leur nouvel appareil d’une garantie prolongée. La garantie légale est fixée à deux ans. La plupart des magasins proposent de l’étendre, moyennant paiement, à cinq ans. La garantie couvre en principe les frais de réparation, c’est-à-dire les déplacements et les heures de travail du technicien, de même que les pièces.

Le prix

Dans la plupart des chaînes, plus l’appareil est onéreux, plus la garantie prolongée l’est aussi. La machine à laver la moins chère de la gamme Mediamarkt, par exemple, coûte 269 euros ; pour 49 euros de plus, le client peut prolonger de trois ans la garantie légale. La machine à laver la plus chère vendue par cette même enseigne coûte 2.189 euros, à quoi correspond une garantie prolongée facturée 119 euros, soit près de 2,5 fois plus que dans le premier cas.

Or en toute logique, plus l’appareil est cher, plus il doit être solide et de qualité et moins le client risque de devoir faire intervenir la garantie. Pourquoi donc celle-ci doit-elle coûter davantage ? Dans le commentaire relatif à son Assurance Garantie Prolongée jusqu’à cinq ans, Krëfel explique que ” dans ces familles de produits, les pièces défectueuses sont pratiquement toujours échangées et non réparées. D’autre part, le prix de certaines pièces est plus élevé pour les appareils où la technologie est plus évoluée, ce qui est le cas des appareils plus coûteux “.

Toutes les chaînes n’appliquent pas le même principe. Vandenborre, par exemple, vend sa garantie prolongée au prix de 119 euros, y compris pour les appareils les moins chers. Eldi pour sa part propose une promotion qui consiste à prolonger gratuitement jusqu’à cinq ans la garantie offerte sur le gros électro des marques AEG, Bosch, Siemens et Liebherr.

Valeur résiduelle

Il nous a été rapporté qu’une cliente s’était entendue conseiller par un vendeur de préférer un appareil bon marché assorti d’une garantie prolongée. Nous avons étudié l’offre des boutiques virtuelles des grandes enseignes, où le prix des machines à laver les plus coûteuses vaut cinq à six fois celui des machines situées à l’autre bout de la gamme tarifaire, garantie prolongée incluse.

Si l’on ne tient compte que du prix d’achat, l’appareil onéreux devrait fonctionner 25 à 30 ans avant de devenir plus intéressant que la machine bon marché. Nous ne prenons pas en considération ici les autres avantages liés au choix d’un équipement de plus grande valeur, comme la moindre consommation d’eau et d’électricité.

Le vendeur parlait certes, du moins en partie, pour son propre magasin. Lorsqu’un appareil sous garantie est irréparable, le commerçant rembourse au client sa valeur résiduelle – sous la forme, dans la plupart des chaînes, de bons d’achat, pas d’espèces sonnantes et trébuchantes, ce qui oblige le consommateur à continuer à s’équiper au même endroit. Les chaînes s’assurent de cette façon de la fidélité de leur clientèle.

La manière de calculer la valeur résiduelle varie d’une enseigne à l’autre. Chez Eldi, la valeur résiduelle diminue à raison d’un certain pourcentage chaque année : 25 % à partir de la troisième année qui suit la livraison, 35 % à compter de la quatrième année et 50 %, à partir de la cinquième. Chez Krëfel, elle diminue de 1 % par mois écoulé depuis l’achat. Imaginons que l’appareil tombe en panne après cinq ans et demi : Krëfel remboursera 46 % du prix d’acquisition. Chez Vandenborre, le client ne récupérera plus, la cinquième année, que 30 % du montant de sa facture. Ce qui peut représenter une sacrée différence.

Les exclusions diffèrent elles aussi. Il faut donc lire attentivement les clauses imprimées en petites lettres. Il est regrettable que la prolongation de garantie ne soit parfois proposée qu’à la caisse, et qu’elle fasse l’objet de peu d’explications lors des achats en ligne.

Souscrire ou non ?

La plupart des services de réparation facturent 100 euros au moins pour les seuls déplacements et heures de travail du technicien. Dès lors, si les pièces coûtent plus de 20 euros, la garantie prolongée semble plus intéressante. Mais est-ce réellement le cas ?

Pour le savoir, il faut premièrement tenir compte de la durée de vie moyenne de l’appareil. Nombreux sont les consommateurs qui estiment qu’ils rendent l’âme trop rapidement. Le magazine Test-Achats a ainsi récolté plus de 6.000 plaintes à ce sujet à l’adresse www.tropviteusé.be, essentiellement pour des smartphones, des imprimantes et des machines à laver. La durée de vie moyenne des machines à laver en question plafonnait à trois à quatre ans, c’est-à-dire moins que la garantie prolongée.

Si l’achat a été payé par carte de crédit, il est parfaitement possible que le client soit d’ores et déjà assuré pour un ou deux ans de plus.

Il convient, deuxièmement, de se demander si le prix de l’assurance n’est pas prohibitif. Il existe des polices qui prolongent jusqu’à cinq ans la garantie de tout un ensemble de machines. L’assureur belge Inter Partner Assistance, qui fait partie d’Axa Assistance, vend de telles assurances aux entreprises, qui peuvent à leur tour les proposer à leurs clients. ” Notre offre est meilleur marché que celle de la plupart des détaillants. Pour le client final, c’est un avantage, mais le revendeur choisit souvent de proposer une couverture par appareil au lieu d’un prix global qui garantirait l’ensemble de l’équipement “, déplore Guy Serdobbel, le porte-parole d’Inter Partner Assistance.

Les énergéticiens Luminus et Engie, par exemple, ont développé une formule de ce type. Tous les clients particuliers de Luminus peuvent bénéficier, pour cinq euros par mois – ce qui revient à 180 euros pour trois ans, d’une extension de garantie sur six appareils. Pour huit machines, la note s’élève à 6,95 euros par mois. Le client peut obtenir jusqu’à trois interventions par an, et le remplacement de l’équipement irréparable. Il n’aura jamais, pour ce prix, une garantie prolongée pour six ou huit appareils dans les magasins d’électroménager.

Troisièmement, il y a lieu de vérifier qu’une autre assurance n’est pas susceptible d’intervenir. Certains organismes de carte de crédit offrent une garantie prolongée de quelques années : si l’achat a été payé par carte, il est parfaitement possible que le client soit d’ores et déjà assuré pour un ou deux ans de plus, par exemple.

Si le vendeur ne laisse pas au consommateur le temps de prendre connaissance des conditions de la garantie prolongée et de peser tous les paramètres, mieux vaut peut-être décliner l’offre.

Dans la plupart des chaînes, plus l'appareil est onéreux, plus la garantie prolongée l'est également.
Dans la plupart des chaînes, plus l’appareil est onéreux, plus la garantie prolongée l’est également.© ISTOCK

Assurances nulles

Il convient enfin de se méfier des marques qui appliquent une stratégie très agressive de vente d’assurances onéreuses, alors que l’appareil a déjà déclaré forfait. Attention : tout accord oral vaut souscription du contrat d’assurance et acceptation de l’ordre de domiciliation. Le client dispose certes d’un délai de rétractation de 14 jours après la réception des conditions sur support papier, mais il doit pour cela adresser une lettre recommandée au fournisseur.

Prenons un exemple concret. Vous appelez Whirlpool pour une réparation : un message vous avertit que l’entretien sera enregistré, soi-disant pour des raisons de qualité. Ensuite, votre interlocuteur vous proposera de souscrire une assurance qui couvrira toutes les interventions effectuées dans les 12 mois sur l’appareil. Si vous manifestez le moindre intérêt, les conditions du contrat vous seront exposées à la mitraillette.

Un lecteur de Trends-Tendances, dont la hotte aspirante était en panne, s’est laissé convaincre de souscrire une assurance pour une prime de 296,89 euros par an, soit environ deux fois le prix de la réparation. Seule consolation : il a la certitude de ne plus rien devoir débourser si la hotte retombe en panne dans l’année… Mais pour 1.000 euros, voire moins, il aurait pu s’offrir un appareil de la même marque assorti de la garantie légale de deux ans, au lieu d’un seul. La hotte défectueuse était âgée de plus de cinq ans : d’après les calculs exposés ci-dessus, sa valeur résiduelle était donc inférieure à la moitié, voire à 30 %, du prix d’achat ; la prime de l’assurance était par conséquent disproportionnée par rapport au service.

D’autant que cette police ne brille pas par son intégrité. ” Elle couvre les réparations de la panne à la suite de laquelle elle a été souscrite, s’indigne un juriste de Test-Achats spécialisé dans ce domaine. C’est une absurdité : une des règles de base veut qu’il soit impossible de souscrire une assurance pour garantir un risque qui s’est d’ores et déjà produit. La loi précise très clairement qu’une telle police est nulle et non avenue. ” D’après Test-Achats toujours, les polices de ce type ressemblent fort à celles proposées – et vivement critiquées – en 2013 pour des smartphones. ” Les primes sont sans commune mesure avec la valeur de l’appareil. La police est commercialisée par des assureurs étrangers, peu connus chez nous, certaines clauses sont illicites et il est probable que les vendeurs et les intermédiaires soient grassement rémunérés. ”

Derrière l’assurance promue par Whirlpool se cache la compagnie britannique Domestic & General. Les questions que nous avons adressées par courriel à l’administrateur délégué qui signe la lettre accompagnant la police, au chargé de relations avec les investisseurs de Domestic & General et au service presse de Whirlpool, sont demeurées sans réponse. Une seule autre marque semble collaborer avec Domestic & General : AEG. Ce choix n’est donc apparemment pas très répandu parmi les distributeurs d’appareils électroménagers.

S’il vous arrive la même mésaventure qu’à notre lecteur, songez à vous adresser au service Ombudsman des Assurances. ” Lorsqu’une police a été souscrite auprès d’une compagnie, le dossier peut toujours nous être soumis, confirme l’ombudsman Josette Van Elderen. Mais les garanties prolongées que peuvent commercialiser les producteurs ou les distributeurs d’appareils électroménagers n’impliquent pas toujours l’intervention d’une entreprise d’assurances : dans ce cas, le consommateur peut s’adresser au service de médiation pour le consommateur. ” L’ombudsman précise n’avoir reçu à l’heure actuelle ” quasiment aucune plainte ” au sujet de polices de ce type.

Assurance ou service ?

Les fabricants eux-mêmes peuvent proposer des garanties prolongées. Miele, par exemple, est la seule marque à offrir, pour 249 euros, une garantie qui peut aller jusqu’à 10 ans. Ce Miele Service Certificate s’achète sur le site internet du groupe et dans les points de vente agréés, aussi longtemps que la garantie légale n’est pas échue. Aux Pays-Bas, l’entreprise a cessé, sur ordre de la Nederlandsche Bank, de commercialiser des extensions de garantie. Robert Bakker, son porte-parole, explique que l’autorité de surveillance néerlandaise les assimile à des assurances. ” Faute de collaborer avec un assureur et d’être titulaire d’une licence, nous ne pouvons plus proposer la garantie prolongée aux Pays-Bas. Nous cherchons une solution à ce problème “, précise-t-il. En Belgique comme dans d’autres pays, Miele continue à commercialiser son certificat au titre de service.

A ce propos, justement : a-t-on affaire à un service ou à une assurance ? Krëfel, nous l’avons vu, parle d’une ” Assurance Garantie Prolongée jusqu’à cinq ans ” ; d’autres chaînes au contraire n’emploient pas ce terme. ” Les garanties supplémentaires proposées à l’achat d’un appareil n’ont pas à être considérées comme des assurances, affirment les juristes de Test-Achats. Par contre, si elles sont vendues indépendamment de la machine, il s’agit bel et bien d’assurances. ”

Quel que soit le statut juridique de la garantie, il importe de savoir quels droits et protection la loi réserve au consommateur. Le principe est en tout état de cause bien celui d’une assurance : le client paie, en une ou plusieurs fois, une prime, pour éviter d’avoir à faire face à des dépenses imprévues.

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