Les modèles Diesel vont-ils perdre de leur valeur sur le marché de l’occasion ?

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Ilse De Witte Journaliste chez Trends Magazine

Après avoir régné sur les routes belges pendant 20 ans, la voiture diesel semble faire marche arrière.

Si la tendance observée au premier semestre 2017 se poursuit, le nombre de voitures à essence immatriculées cette année sera supérieur à celui des diesels pour la première fois depuis 1997. Selon la Febiac, la fédération belge de l’automobile et du cycle, cette tendance s’explique par la suppression de la prime fédérale allouée aux voitures à faibles émissions de CO2 qui favorisait essentiellement les diesels. Le scandale du dieselgate a semé le doute dans les esprits quant à la fiabilité des tests sur les émissions automobiles et sapé la confiance du public dans les véhicules roulant au diesel. Les tests imposés aux nouveaux modèles diesels seront plus sévères le 1er septembre prochain. Et à partir du 1er septembre 2018, toutes les nouvelles voitures seront soumises à des tests plus stricts.

Faut-il s’attendre pour autant à une dévalorisation des autos roulant au diesel? ” Nous n’observons pas d’impact significatif sur la valeur résiduelle des voitures diesels à la fin du contrat de leasing “, déclare Gerry Van Aken, marketing manager d’Alphabet Belgium. Frank Vancamp, directeur Automotive, Leasing & Mobilité chez KPMG, est du même avis : le dieselgate n’a pas mis les prix sous pression. ” Nous anticipions un impact significatif et immédiat de ce scandale sur la valeur résiduelle mais ce n’est pas le cas, ajoute Frank Vancamp. La crise financière a fait nettement plus de tort que le scandale du diesel car les banques ont fermé le robinet des crédits. ”

” Le basculement du parc automobile vers l’essence a débuté il y a quelques années déjà, constate Frank Vancamp. Il a commencé chez les particuliers et se poursuit au sein des entreprises, elles aussi de plus en plus nombreuses à se désintéresser du diesel. Même si ces voitures de fonction roulent davantage. ” Selon le test budgétaire annuel du VAB, club dédié à la mobilité, 85 % des particuliers ont tout intérêt à préférer l’essence au diesel car ils parcourent moins de 20.000 kilomètres par an. D’une part, les voitures à essence deviennent de plus en plus sobres. D’autre part, les moteurs diesels doivent être équipés d’une mini-usine chimique pour être tout à fait conformes aux normes d’émissions, ce qui accroît considérablement le prix de ces véhicules. Le surcoût que représente l’achat d’une diesel doit être compensé par une consommation peu onéreuse. Or le gouvernement ne cesse d’augmenter les accises sur ce carburant, ce qui pousse le prix à la hausse. Au 1er janvier 2019, les accises sur le diesel et l’essence seront uniformisées. Selon le VAB, la voiture diesel ne sera plus intéressante que pour 3 % seulement des particuliers.

Des effets sur les prix à long terme

A la question de savoir quelles voitures sont les plus susceptibles de conserver leur valeur, Frank Vancamp répond avec beaucoup de prudence. ” Le gouvernement cherche à rendre le parc automobile plus écologique. Cette politique pourrait avoir un effet sur les prix à long terme mais pas à court terme. Il faut considérer l’évolution des prix au plan international. Un grand nombre de voitures de société ‘belges’ en fin de leasing s’exportent à l’étranger. Les moteurs essence et diesel, éventuellement combinés à un moteur électrique, ont encore de beaux jours devant eux. Ils polluent, nul ne l’ignore, mais ils sont aussi plus fiables du fait de leur plus grande disponibilité et du maillage plus étendu de stations-services.

Au 1er janvier 2019, les accises sur le diesel et l’essence seront uniformisées. Selon le VAB, la voiture diesel ne sera plus intéressante que pour 3 % seulement des particuliers.

A en croire Frank Vancamp, les moteurs essence et diesel ne risquent pas de disparaître de sitôt. ” Pour ce qui est de la technologie, on se dirige vers l’une ou l’autre forme d’électrification, à des degrés différents mais il est aujourd’hui impossible de savoir quelle technologie prédominera. Ainsi, par exemple, l’hydrogène est sans aucun doute le carburant le plus propre, tant en termes de production que de consommation, mais il nécessite des investissements supplémentaires pour garantir un maximum de sécurité. La question fait débat depuis 10 ans déjà. La voiture de demain sera-t-elle 100 % électrique ? Le paysage automobile est en train de changer, c’est indéniable mais l’avenir dépendra en grande partie de la technologie des batteries. Frank Vancamp met ici le doigt sur un autre problème : ” On peut encourager le consommateur à acheter une voiture électrique ou au gaz, encore faut-il qu’une infrastructure adéquate soit disponible. Or tant qu’on ignore quelle technologie prévaudra, la plupart des gouvernements rechignent à investir lourdement dans ces infrastructures. La technologie actuelle n’est pas encore assez développée, elle doit encore mûrir. ” La Belgique ne compte encore qu’une cinquantaine de stations-services adaptées aux voitures au gaz. Même si toutes les maisons sont dotées de prises électriques, l’autonomie d’une batterie chargée reste limitée (lire l’encadré plus bas).

Une voiture électrique coûte facilement 10.000 euros de plus qu’une voiture à essence comparable. La Flandre octroie une prime de 4.000 euros maximum, en fonction de la valeur catalogue. Cette prime sera rabotée de 1.000 euros annuellement en 2018 et en 2019, et définitivement supprimée en 2020. La Wallonie et Bruxelles n’allouent pas de prime. ” La durée de vie des batteries suscite encore bien des incertitudes. Un moteur diesel ou essence dure au moins 8 à 10 ans. La plupart des constructeurs de voitures électriques délivrent une garantie de cinq à sept ans sur la batterie pour rassurer les candidats acheteurs. Quant à la valeur résiduelle des voitures électriques, les doutes sont bien réels. Il faut débourser au bas mot 10.000 euros, voire plus, pour remplacer la batterie d’une voiture électrique. Un changement en profondeur est en train de se produire mais, dans un premier temps, j’anticipe une transition vers des voitures hybrides équipées d’un moteur classique complété d’un moteur électrique, plutôt qu’un basculement complet vers l’électrique. ”

Le système de propulsion d’une voiture est un des principaux facteurs déterminants de sa valeur, estime encore Frank Vancamp. ” Les nouvelles technologies de sécurité peuvent parfois diminuer les primes d’assurance mais n’ont que peu d’incidence sur la valeur de revente d’un véhicule. ” A l’heure actuelle, 5 % seulement des nouvelles voitures mises en circulation en Belgique sont propulsées par un moteur qui n’est pas exclusivement essence ou diesel.

Wall box et nouvelle installation électrique

“Chaque voiture électrique est fournie avec un chargeur qui se branche sur n’importe quelle prise électrique. Mais pour effectuer les trajets quotidiens domicile-travail en voiture électrique, il vous faut une wallbox, un boîtier intelligent qui permet de réduire le temps de charge de 12 à 6-8 heures. L’inconvénient, c’est que vous consommez l’équivalent en électricité de deux lave-linge qui tournent”, explique Gert Verhoeven, du VAB.

L’installation électrique et les raccordements de certaines maisons âgées de 30 à 40 ans ne sont pas toujours assez puissants. Gert Verhoeven estime le prix de la wallbox relativement raisonnable (1.000 euros environ), d’autant que certains vendeurs offrent une partie du coût de son installation.

“Mais à cela s’ajoutent les frais nécessaires pour remplacer les prises électriques et les raccordements dans les anciennes maisons afin d’optimiser l’utilisation de la wallbox “, prévient-il.

“Sans parler des pertes. Le courant qui sort d’une prise électrique est alternatif. Il doit être converti en courant continu pour recharger la batterie, puis ensuite être reconverti en courant alternatif pour faire tourner le moteur de la voiture. Pendant le rechargement, les batteries doivent aussi être refroidies par la climatisation, ce qui demande pas mal d’énergie. L’ordinateur de bord tient compte uniquement de la consommation de la voiture, pas des pertes occasionnées. Malgré cela, le coût énergétique d’une voiture électrique est aujourd’hui de 20 à 50 % inférieur à celui d’une voiture essence ou diesel”, précise Gert Verhoeven.

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