Pourquoi les célibataires sont toujours les plus taxés en Belgique

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Niels Saelens Rédacteur Moneytalk.be

Les chiffres de l’OCDE nous apprennent que la pression fiscale en Belgique diminue, mais les célibataires restent toujours les plus taxés. “J’ai néanmoins l’impression que les esprits sont mûrs pour une politique qui tient compte des personnes seules”, déclare Carla Dejonghe, la présidente de l’ASBL All1.

Notre pays comptait l’an dernier, avec 54%, la pression fiscale moyenne la plus élevée pour les employés célibataires sans enfants. Notre pays précède amplement les pays comme l’Allemagne (49,4%), la Hongrie (48,2%) et la France (48,1%). La pression fiscale moyenne pour les couples mariés avec deux enfants et un parent qui travaille était de 38,6% dans notre pays.

Les autorités ne peuvent pas rester aveugles

Selon Dejonghe, les autorités ne peuvent plus rester aveugles devant l’un des développements démographiques les plus frappants de la dernière décennie: le nombre croissant de célibataires. En Flandre, ils sont presque un million. “Toutes les études montrent que ce groupe augmentera encore sérieusement au cours de la prochaine décennie. Et comme Nathalie Le Blanc l’affirme dans son livre Solo: que la société ouvre les yeux ou non, singles are here to stay“, explique Dejonghe.

Toujours plus d’hommes et de femmes politiques semblent néanmoins accorder de l’attention aux préoccupations fiscales des célibataires. Les Malinois célibataires recevront ainsi dans le courant de cette année-ci un bon cadeau de 25 euros dans leur boîte aux lettres. Les célibataires de cette ville sont ainsi compensés pour l’importante taxe sur les déchets. Ce bon correspond à une réduction de 4% sur le total de la contribution fiscale annuelle d’un célibataire à la ville.

Le ministre bruxellois des Finances Guy Vanhengel (Open Vld) a pris quelques mesures en 2015 pour donner un petit coup de pouce financier aux célibataires. Il a ainsi diminué les droits d’enregistrement en échange de la suppression du bonus logement bruxellois.

“La réforme fiscale bruxelloise démontre qu’il ne doit pas nécessairement s’agir de mesures fiscales spécifiquement orientées pour les célibataires”, explique Dejonghe. “La suppression de la taxe régionale forfaitaire est une bonne chose pour tous les Bruxellois. Mais cette taxe forfaitaire était surtout désavantageuse pour les personnes vivant seules.” À Bruxelles, il y a aussi eu la diminution de 1% de taxe d’agglomération sur l’impôt des personnes physiques en 2016. Cette année, cet impôt des personnes physiques est encore une fois diminué de 0,5%”

D’autres Régions font des progrès aussi

La réforme fiscale bruxelloise démontre qu’il ne doit pas nécessairement s’agir de mesures fiscales spécifiquement orientées pour les personnes seules

Bruxelles-Capitale n’est pas la seule Région à essayer de s’adapter aux célibataires. Le 1er juillet 2015, la Région flamande a considérablement diminué les droits de donation sur les biens immobiliers. La Région bruxelloise et la Région wallonne ont suivi en 2016. “C’est une bonne chose pour les célibataires. Ça leur offre la possibilité de contourner les énormes droits de succession pour léguer leur patrimoine à des tiers”, ressort-il

Ensuite, le gouvernement flamand désire soutenir les nouvelles formes de vie en commun. En 2015, le Parlement flamand a approuvé une proposition de résolution pour permettre de nouvelles formes de cohabitation, comme le co-housing. À Bruxelles aussi, quelque chose de similaire est en chantier; le gouvernement bruxellois développe un label d’habitat solidaire. “À partir de 2017, ce label devrait tranquilliser tant les propriétaires que les colocataires concernant les conséquences financières de l’habitat groupé. Les autorités peuvent de cette manière également être assurées qu’avec une habitation portant ce label, on n’a pas affaire à des marchands de sommeil”, explique Dejonghe.

Elle est en outre persuadée que les gouvernements régionaux peuvent encore modifier d’autres règles. “Tout comme les Régions ont diminué les droits de donation, elles devraient également oeuvrer à la diminution des droits de succession”, selon Dejonghe. En 2015, Vanhengel proposait que chacun puisse désigner un non-membre de la famille qui pourrait hériter au taux familial. “Pour cela, une majorité politique doit bien sûr être trouvée.”

Guy Vanhengel (Open VLD)
Guy Vanhengel (Open VLD)© Belga

Le ministre flamand du Budget Bart Tommelein (Open Vld) désire également modifier la taxe successorale. Des groupes de travail ont reçu la mission du ministre de supprimer ces considérables différences par rapport aux héritiers en ligne directe, notamment parce que les héritiers essaient d’échapper à cet impôt par le biais de toutes sortes de détours et contournements.

Le gouvernement fédéral à la traîne

Il y a pourtant encore pas mal de pain sur la planche, selon la présidente d’All1. Le gouvernement fédéral surtout devrait passer à la vitesse supérieure selon elle. “Il devrait élaborer un système par lequel on puisse introduire, au bureau de l’état civil de la commune, une adresse séparée par ménage dans un lien d’habitat solidaire”, continue-t-elle. “Deux célibataires qui louent une habitation ensemble pour diviser les frais pourraient ainsi être reconnus officiellement comme deux ménages séparés d’une personne.”

Dejonghe considère également l’impôt des personnes physiques. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) observe que le célibataire belge sans enfant est le plus lourdement taxé de tous les États membres européens. Un célibataire sans enfant à charge contribuait l’an dernier à hauteur de 54% de son salaire brut. “Le montant exonéré d’impôt en est la cause”, explique la présidente d’All1. Celui-ci est le même pour les familles et les célibataires.

“Cela n’a pas toujours été ainsi”, souligne Dejonghe. Jusqu’à l’année d’imposition 2004, les célibataires obtenaient un montant exonéré d’impôt plus élevé du fait qu’ils avaient une capacité financière plus petite. Depuis 2005, le gouvernement fédéral, sur requête de la Cour constitutionnelle, a éliminé cette règle. Un important avantage fiscal des célibataires s’est de ce fait perdu. “Ma proposition est la suivante: augmentons le montant exonéré pour tous les contribuables. Ce qui est bien conforme à la constitution.”

Réflexe célibataire

En 2013, Dejonghe a lancé le réflexe célibataire. Celui-ci fait, à chaque mesure politique, réfléchir les gouvernements à la question de l’impact de celle-ci sur les personnes qui vivent seules. Elle est très contente que l’idée d’un réflexe célibataire reçoive une portée plus large et soit reprise par différents partis politiques.

“C’est juste un peu déroutant, car un parti attribue ma définition de ‘réflexe célibataire’ au terme ‘singlestoets’ (test célibataire) et un autre parti utilise bien le terme ‘réflexe célibataire’, mais lui donne un autre contenu”, conclut De Jonghe.

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