Crédits hypothécaires: pourquoi les taux bas sont parfois trop beaux pour être vrais

© Belga
Niels Saelens Rédacteur Moneytalk.be

Lors de la souscription d’un crédit logement auprès d’une banque, on se laisse trop souvent induire en erreur par les taux d’intérêt. “Les consommateurs doivent être beaucoup plus critiques”, selon John Romain d’immotheker finotheker.

Etant donné les taux actuellement très bas pour un crédit logement, beaucoup de Belges vont trouver leur banque pour souscrire un crédit hypothécaire. Les crédits à court terme se portent particulièrement bien. Des chiffres de la Confédération des professions immobilières en Flandre, il ressort que 44% des acheteurs en 2015 ont opté pour un crédit logement sur une durée de 15 ans ou moins. Il y a cinq ans, plus de 67% des acheteurs ou des constructeurs empruntaient encore pour une durée de 25 à 30 ans.

Crédit sur mesure

“Une tendance très bizarre”, réagit John Romain d’Immotheker finotheker. “Ce devrait être juste le contraire: les gens devraient souscrire un crédit sur 20 ou 25 ans aujourd’hui, ou même sur une plus longue durée. De cette manière, ils peuvent assurer leur niveau de vie. Mais les banques préfèrent que ceux qui cherchent à acheter une petite maison n’empruntent pas l’argent pour trop longtemps. C’est la raison pour laquelle elles mènent une politique qui privilégie davantage les durées d’emprunt plus courtes. Et comme il ressort des chiffres ci-dessus, avec succès.”

Les gens devraient souscrire un crédit sur 20 ou 25 ans aujourd’hui, ou même sur une plus longue durée

Du fait que les prêteurs savent que les clients mettent surtout le focus sur l’obtention du taux le plus bas, ils tiennent trop peu compte, selon Romain, voire même pas du tout, de ce qui devrait vraiment être l’objectif: un crédit logement sur mesure pour chaque client, qui doit garantir la consommation future nécessaire et souhaitée. Les consommateurs n’accordent de la sorte pas suffisamment d’attention à leur capacité à continuer à supporter la charge d’emprunt mensuelle.

‘Sans matelas de sécurité en cas de circonstances de vie qui évoluent ou en cas de revers, on risque de se retrouver dans de graves problèmes’, explique Romain. “En outre, avec le bonus logement, il est aussi plus attractif de s’engager dans un crédit à plus long terme.”

L’avantage fiscal du bonus logement a (ou aura, à Bruxelles) fortement diminué, maintenant que les Régions ont hérité des compétences en la matière. (Voir à ce sujet l’article intitulé Le point sur le bonus logement, Région par Région)

Vente groupée d’un package

Mais d’autres dangers guettent celui qui recherche uniquement le taux d’intérêt le plus bas, avertit Romain. Un taux bas est parfois contrebalancé par d’autres frais.

Si vous surfez sur un site comparatif comme CompareBanque.be, vous apprendrez que Belfius prélève 3,12% d’intérêts pour un crédit logement sur 25 ans. Après négociations, la banque d’Etat sera sans aucun doute disposée à accorder une réduction. Chez Moneytalk, nous avons ainsi pu obtenir un taux de 2,35%. “Une proposition séduisante de prime abord, mais les clients doivent aborder ce type d’offres avec la prudence nécessaire. Ce qu’une banque donne d’une main, elle le reprend doublement, et encore plus, de l’autre”, selon Romain.

“En tant que client, vous achetez en effet souvent des produits dérivés plus chers – le compte, une assurance décès ou une assurance incendie… – pour obtenir le taux le plus bas, sans vraiment réaliser quels peuvent en être le coût total ou les conséquences”, explique-t-il. “Vous aurez par exemple une forte augmentation du taux si vous ne satisfaites plus aux conditions de la vente groupée du package.”

Coût total

Une nouvelle loi, qui entre en vigueur à partir du 1er décembre, devrait apporter du changement dans la manière dont les banques informeront le client. Celle-ci oblige les intermédiaires de crédits et les prêteurs à dorénavant communiquer le coût total d’un crédit aux consommateurs. Ensuite, ils devront indiquer les risques au client.

“Cette nouvelle loi sera un coup dans l’eau”, réagit Romain. “Les prêteurs peuvent postposer la remise du formulaire informatif obligatoire jusqu’à ce qu’ils soumettent la proposition de crédit. C’est beaucoup trop tard. Cela va pourtant de soi que cela devrait avoir lieu pendant la phase de conseil. Il semble à présent que la phase de conseil serve seulement de feuille de vigne avant la vente du produit.”

Nouvelle loi

“Mais il y a encore d’autres anguilles sous roche”, continue-t-il. La nouvelle loi ne met pas fin à la vente groupée de package.

“Les intermédiaires de crédit et les prêteurs doivent être plus transparents, mais le client est encore souvent obligé de prendre d’autres produits avec son crédit s’il désire obtenir un taux d’intérêt plus bas. S’il doit payer pendant des années un produit qui n’est pas intéressant pour lui par rapport à d’autres produits, le client se retrouve pris en otage. Les prêteurs continueront à pénaliser les clients qui désirent prendre une assurance habitation, par exemple, auprès d’une autre institution, par des taux d’intérêt plus élevés”.

Les prêteurs continueront à pénaliser les clients qui désirent prendre une assurance habitation auprès d’une autre institution par des taux d’intérêt plus élevés

Romain est convaincu que les banques continueront à séduire les clients avec des réductions de taux supplémentaires en proposant des produits qui ne seront plus groupés à un crédit logement. “En d’autres mots, la nouvelle législation ne veille donc pas à plus de transparence. Les banques trouveront toujours d’autres chemins.”

Faire ses devoirs

Selon le conseiller, la seule personne capable d’améliorer la situation est le client lui-même. “Celui-ci doit faire lui-même ses devoirs”, dit-il. Il conseille aux consommateurs de d’abord faire un plan de vie dans lequel ils tiennent compte des éventuels changements dans leur vie.

“Il doivent ainsi davantage regarder vers le futur. Tous les changements possibles au niveau du style de vie ou de la situation financière doivent être envisagés lors du choix du crédit logement adéquat.” Les plans familiaux (désir d’enfants), les frais de logement (plus de frais en tant que propriétaire), l’âge prévu, les plans de voyage et le développement de carrière envisagé ne sont que quelques exemples cités par Romain. “Ce n’est que de cette manière que le client arrivera à un crédit logement fait sur mesure pour lui”, ressort-il.

Intermédiaire indépendant

Immotheker finotheker est un intermédiaire qui aide à rechercher un tel crédit logement sur mesure. Il facture une commission pour cela, mais selon Romain, les courtiers communiquent ouvertement à ce sujet. “Le consommateur n’a donc pas de surprises.”

La souscription directe d’un crédit logement auprès d’un banque-assureur est encore fortement ancrée en Belgique

Romain est certain que ceux qui cherchent à acheter une petite maison iront de plus en plus souvent consulter un planificateur et intermédiaire indépendant. La confiance dans le banque-assureur se trouve selon lui plus que jamais à un niveau très bas. “La souscription directe d’un crédit logement auprès d’un banque-assureur est encore fortement ancrée en Belgique”, reconnaît-il. “Mais il est fermement convaincu que “malgré le prix, les consommateurs peuvent largement trouver leur avantage auprès d’un conseiller financier intermédiaire”.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content