Votre banquier vous cache des choses

Dans son livre “Ce que votre banquier ne veut pas que vous sachiez”, Jean Walravens, économiste, chargé de recherches à l’Université de Bruxelles, guide les épargnants dans les méandres parfois douteux du monde bancaire.

Tantôt didactique, tantôt critique, Ce que votre banquier ne veut pas que vous sachiez doit avant tout être considéré comme un guide dans les relations que nous entretenons avec notre banquier et même notre assureur, dans une certaine mesure.

Comme le souligne Michel Claise, juge d’instruction à Bruxelles spécialisé dans la lutte contre la criminalité en col blanc, dans la préface du livre (2), “la relation entre le banquier et son client est un contrat léonin. La banque sait tout de son client. Le client ne sait rien des pratiques (douteuses) de la banque”. Par le biais de son analyse critique de cette relation et des pratiques bancaires, Jean Walravens tend à casser ce rapport pour le moins déséquilibré entre le banquier et son client.

Charité bien ordonnée commence par soi-même

Lorsque vous confiez vos économies à votre banquier, c’est pour les faire fructifier et non pour l’enrichir. Pourtant, dans la réalité…

Avec plus de 220 milliards d’euros parqués sur les comptes d’épargne en Belgique, ce produit bancaire est un produit financier qui peut difficilement être négligé. Or le comportement très docile des épargnants belges, fidèles envers et contre tout à leur banquier, facilite les baisses de taux d’intérêt successives sans pour autant induire d’exode massif de clients vers les comptes d’épargne les plus rémunérateurs.

Dans le passage suivant de l’ouvrage Ce que votre banquier ne veut pas que vous sachiez (3), Jean Walravens relève toute l’importance pour l’épargnant de se réveiller et de ne pas être trop fidèle à son banquier.

“A même risque, les taux d’intérêt des comptes d’épargne ne sont pas les mêmes partout…

…Contrairement aux obligations où le marché joue son rôle d’arbitrage et où les rendements correspondent aux risques, la situation est différente pour les comptes d’épargne. Le peu d’enclin des particuliers à changer de banque où à ouvrir un second compte a pour conséquence que les grandes banques classiques sont en mesure de garder des clients sur leurs comptes d’épargne tout en leur offrant des rendements inférieurs à ceux offerts par la concurrence.”

Des fonds de placement bien trop chiches

Le principe de précaution ne vaut pas que pour le choix d’un compte d’épargne. Investir dans un produit financier peut également avoir des conséquences en fonction du type de produit choisi.

Echaudés par des crises boursières de plus en plus fréquentes, nombre d’investisseurs préfèrent désormais placer leur argent en Bourse par l’entremise de fonds de placement à capital garanti. Si l’investisseur a, dans ce cas, la certitude de récupérer au moins le capital investi, en termes de rendement par contre, il ne doit pas attendre monts et merveilles, avertit Jean Walravens dans le passage suivant (4).

“Les fonds à capital garanti offrent un rendement insuffisant…

…Un exemple de fonds à capital garanti est le Fortis B Fix 2007 Equity 2Geared Call. Il a été constitué en novembre 2006 pour une durée de sept ans. D’après nos calculs, le rendement réel (hors inflation) annuel moyen espéré est négatif : -0,22 %. Ce montant est inférieur au rendement réel net annuel de 0,69 % procuré par un compte à terme à sept ans ouvert au moment de l’émission de la sicav. La presse spécialisée a publié l’article Que rapporte votre fonds à capital garanti. Les résultats qu’ils ont observés sont similaires à ceux de notre exemple. 863 fonds à capital garanti, arrivés à échéance depuis 2003, ont été analysés. D’après cet article, Le return annuel s’élève à 2,5 %, un chiffre inférieur aux 3 % annuels moyens des livrets d’épargne à haut rendement. Obsédé par la protection du capital, le Belge ne perd-il pas de vue le rendement de son portefeuille ?

Même quand la Bourse monte franchement comme en 2010, les rendements des fonds d’actions à capital garanti restent médiocres. En 2010, le fonds Post Multifix Lift de la Banque de la Poste, dont le rendement est basé sur un panier de 20 actions internationales, a généré un rendement de 2,98 % net alors que l’indice return MSCI AC World Index NetEUR grimpait de 20,50 %.”

C’est bien simple, Jean Walravens conseille aux investisseurs de se constituer eux-mêmes leur fonds à capital garanti afin d’éviter toute mauvaise surprise au niveau du rendement.

Dans tous les cas de figure, il ne recommande pas de se rabattre sur les fonds à rendement absolu qui, selon lui, souffrent du même écueil, comme nous pouvons le lire ci-après. (5)

Les fonds à rendement absolu ont un rendement insuffisant

…Un autre type de hedge fund qui attire facilement les épargnants est ce qu’on appelle les fonds à rendement absolu (absolute return). Les fonds absolute return essaient de générer des rendements toujours positifs, les plus élevés possible, quelles que soient les évolutions des cours des actions et des obligations.

Certains gestionnaires adorent placer ce genre de produits dans les portefeuilles de leurs clients. On les retrouve parfois sous la dénomination “alternatifs” dans le poste “obligations et monétaires” des états de portefeuille. Ils génèrent des commissions et prennent la place des dépôts à terme et autres produits similaires qui, eux, ne génèrent aucune commission pour le gestionnaire.

La déception, ici aussi, est au rendez-vous. D’après la presse financière du 13 juillet 2007 qui cite une étude de Standard & Poor’s : “Aucun des fonds absolute return étudiés n’a atteint son objectif entre le 1er mars 2006 et le 1er mars 2007“. La situation ne s’est pas améliorée depuis lors et le Wall Street Journal du 24 janvier 2011 montre que la performance moyenne des fonds qui contiennent absolute return dans leurs noms, a été négative sur les trois dernières années (2008 à 2010).

Toujours au registre des fonds de placement, l’auteur se penche sur le cas des fonds éthiques et son constat est affligeant (6).

“Les fonds éthiques sont une ‘vache à lait’ pour les banques…

… Les fonds “éthiques” sont un des domaines favoris des banques. Il y a deux raisons à cela.

La première est publicitaire. Associer “éthique” au nom de son entreprise rapporte en image de marque. Certaines banques peuvent en avoir besoin.

La deuxième raison est financière. Les investisseurs éthiques semblent se soucier moins que les autres des rendements obtenus. Ils ont une certaine gêne à gagner trop d’argent. Si leurs fonds éthiques sous-performent les autres fonds, ils ont l’impression d’avoir participé à une bonne oeuvre.

Ces raisons ont permis à certaines banques de construire des fonds qui leur rapportent plus d’argent. Même en tenant compte des coûts particuliers des fonds éthiques, les frais, commissions et autres rémunérations de toutes sortes sont en moyenne plus élevés dans les fonds éthiques.

Karine Huet

(1) Jean Walravens, Ce que votre banquier ne veut pas que vous sachiez, Editions Le Bord de l’Eau, Collection La Muette, 2012.

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