Tristesse fiscale

La période est particulièrement triste pour l’investisseur. Année après année, mois après mois, des mesures – fiscales et autres – sont prises, qui le touchent directement ou indirectement. Il est clair que l’épargne est une proie très recherchée. Nombreux sont ceux qui pensent qu’elle doit être sollicitée pour colmater les brèches. Et la chasse est de plus en plus impitoyable.

Jusqu’il y a quelques années, cette proie convoitée était difficile à débusquer. Les dirigeants politiques savaient que si l’épargne était trop lourdement imposée, les Belges éviteraient de déclarer ces revenus. C’est le célèbre “effet Laffer”. L’économiste A. Laffer a constaté qu’une augmentation des taux d’imposition entraînait une diminution des recettes fiscales parce que le contribuable trouvait le coût trop élevé. Pour préserver les recettes fiscales, les dirigeants politiques sont donc obligés de maintenir la pression fiscale dans les limites du raisonnable.

Mais l’épargnant éprouve des difficultés croissantes à se cacher. A l’étranger, comme en Belgique. La collaboration internationale et l’échange d’informations sur les avoirs des investisseurs s’intensifient. L’exemple le plus connu est la Directive européenne sur l’épargne. Simultanément, l’épargne belge est de plus en plus à découvert. C’est la conséquence notamment des attaques incessantes sur le système du précompte mobilier libératoire et de l’établissement d’un registre central des comptes bancaires.

Et à mesure que ce gibier prisé est de plus en plus visible, la chasse reprend de plus belle. L’État est de moins en moins entravé par l’effet Laffer. Il a sa proie dans le viseur, elle ne peut plus lui échapper. Et les impôts augmentent systématiquement. L’augmentation de décembre 2011 n’avait pas encore été digérée que nous sommes confrontés à un nouveau tour de vis fiscal en mars 2012. Car en dépit de ce qu’affirment les dirigeants politiques, c’est bien de la poche des investisseurs (et des fumeurs) que proviendront les moyens supplémentaires. On peut craindre que le prochain contrôle budgétaire de juillet 2012 soit l’occasion d’une nouvelle série d’augmentations d’impôts !

En soi, cette évolution est regrettable. Mais il y a plus grave. On ne parvient pas à maintenir l’inflation sous contrôle. L’inflation actuelle, combinée aux taux plancher proposés sur les livrets d’épargne, signifie que l’épargnant s’appauvrit. Son rendement net est en effet négatif. Un appauvrissement encore aggravé par l’imposition des rendements. Et les investisseurs n’ont pas encore bu le calice jusqu’à la lie. La tragédie grecque le prouve. Les investisseurs qui y ont été entraînés doivent à présent avaler de lourdes moins-values sur leurs obligations. Des moins-values qui ne sont pas déductibles fiscalement.

Reste à espérer que l’on en tiendra compte lors du prochain contrôle budgétaire. Comme les actifs et les entreprises ont atteint leurs limites fiscales, on se tourne de plus en plus vers les investisseurs lorsqu’il s’agit de trouver de nouvelles recettes. Les investisseurs en sont réduits à souhaiter que des dirigeants politiques s’intéressent enfin au volet des dépenses pour assainir les comptes.

Anton van Zantbeek, avocat chez Rivus

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