Revenus complémentaires non taxés: ‘La crainte d’une concurrence déloyale est infondée’

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Bart Vereecke Rédacteur MoneyTalk et Trends

Régulièrement, MoneyTalk pose trois questions sur l’actualité à un spécialiste. Els Cleemput, porte-parole de la ministre des Affaires Sociales Maggie De Block (Open Vld), nous explique la mesure qui permettra, à partir du 1er janvier 2018, de gagner chaque année 6.000 euros de revenus complémentaires non taxés.

Pouvez-vous donner davantage d’explications sur le côté pratique de la mesure ? Quelles démarches la personne qui désire gagner des revenus complémentaires devra-t-elle entreprendre concrètement ? Et qu’en est-il des personnes qui auront des revenus complémentaires supérieurs aux montants maximums ?

ELS CLEEMPUT: Il s’agit de revenus complémentaires au moyen d’activités qui tombent entre l’emploi régulier et le bénévolat et qui sont réalisées par une personne physique. Il existe déjà une liste temporaire, mais celle-ci sera probablement encore adaptée.

Concrètement, il s’agit de trois possibilités: les citoyens qui s’impliquent pour une ASBL, les services occasionnels entre les citoyens et la prestation de services via l’économie collaborative. En principe, seuls les travailleurs qui travaillent au moins à 4/5, les indépendants à titre principal et les pensionnés entrent en considération.

Les chercheurs d’emploi peuvent aussi gagner des revenus complémentaires, mais pour eux, il n’y a que deux options et les conditions sont plus strictes. Ils peuvent soit obtenir des revenus complémentaires dans le cadre de la vie associative, sous réserve que cela se fasse via une trajectoire de réactivation reconnue, soit via une plateforme de l’économie collaborative reconnue. Dans ce dernier cas, leurs revenus sont soustraits de leurs allocations de chômage. Les chercheurs d’emplois n’ont donc pas le droit de prester des services à d’autres citoyens.

Seuls les employés qui travaillent au moins à ?, les indépendants et les pensionnés entrent en considération. Et pour les chercheurs d’emploi, il y a une exception.

De manière générale, pour tous les revenus complémentaires réalisés dans ce cadre, une exonération fiscale et sociale s’applique jusqu’à un montant maximum de 1.000 euros par mois et de 6.000 euros par an. Les personnes qui décident de gagner 1.000 euros complémentaires pendant six mois et puis plus rien le restant de l’année, ne paieront donc pas d’impôt sur ces montants.

Celui qui arrivera au-delà de ces montants fera simplement usage du système actuel, où les revenus complémentaires sont additionnés dans leur intégralité aux revenus de l’activité principale. L’impôt est dans ce cas calculé sur le total.

L’Office national de sécurité sociale (ONSS) aura mis au point une app pour le 1er janvier 2018. Celui ou celle qui désire recourir au système des revenus complémentaires non taxés, devra se faire connaître via cette app et y renseigner le montant qu’il ou elle gagne de la sorte. Ces informations seront partagées avec le ministère des Finances notamment, afin de rendre le contrôle possible.

Pour les services entre citoyens, il n’est pas nécessaire de rédiger un contrat, mais la personne qui preste le service occasionnel devra néanmoins prendre une assurance en responsabilité civile complémentaire pour se couvrir contre les dommages. Si un citoyen offre ses services à une association, un contrat devra par contre être rédigé pour définir la rémunération. Ensuite, l’association devra aussi prendre une assurance en responsabilité civile et une assurance pour couvrir les dommages corporels.

Cela ressemble un peu à une ‘mesure pour la mesure’. Avions-nous vraiment besoin de cela ? Qu’espère viser le gouvernement ?

Avec la nouvelle mesure, il est donné suite à l’avis du Conseil supérieur des volontaires. Sur la requête de la ministre des Affaires sociales De Block, celui-ci s’était penché sur le développement d’un statut qui se distingue tant de celui du travail bénévole que de celui du travail régulier.

Il avait été constaté que, dans le secteur du non marchand, il n’existait pas de cadre légal approprié pour les activités qui ne peuvent pas être considérées comme de l’emploi régulier, mais également pas comme du volontariat. La nouvelle mesure vise à créer de la clarté pour tout ce qui se situe dans cette zone grise et elle est donc en premier lieu une simplification.

Nous voulons récompenser le travail et l’entrepreneuriat

Jusqu’à présent, celui ou celle qui voulait gagner quelques revenus complémentaires devait s’affilier comme indépendant complémentaire et auprès d’une caisse d’assurance sociale, et il ou elle devait demander un numéro d’entreprise et un numéro de TVA. En outre, ces revenus complémentaires s’additionnaient simplement au salaire, ce qui risquait de l’amener dans une tranche de revenu supérieure et de réduire ce revenu complémentaire à pas grand-chose en net. Pour les personnes qui restent en dessous du montant maximum, cela disparaît complètement.

Il y a un certain nombre d’avantages liés à la nouvelle mesure. Tout d’abord, il s’agit souvent de travail utile socialement. Il est dès lors important qu’il puisse être réalisé le plus aisément possible. Deuxièmement, nous voulons récompenser le travail et l’entrepreneuriat. Nous pensons à cet égard aussi que la mesure peut veiller à ce que des chômeurs acquièrent de la sorte de l’expérience plus facilement et trouvent éventuellement la voie vers le statut d’indépendant.

Nous désirons également contrecarrer l’abus du statut de bénévole et de l’indemnisation de frais forfaitaire. Pour finir, nous désirons aussi offrir l’opportunité aux clubs et associations de se professionnaliser davantage. Un travailleur du monde associatif qui est payé, vous pouvez par exemple lui donner une formation.

Pas mal d’objections ont déjà été exprimées contre la mesure. Des questions sont ainsi soulevées sur les conséquences pour les recettes fiscales et sur l’incidence sur la pension. Le secteur de la construction et les entrepreneurs de jardin craignent une concurrence déloyale. Tous ces aspects sont-ils suffisamment pris en considération et y a-t-il suffisamment de communication à ce propos ?

Les griefs en ce qui concerne la perte de recettes fiscales et l’impact sur les pensions s’annulent. Les gens peuvent en effet décider, au lieu de travailler à temps plein, de passer à un régime 4/5e, dans le cadre duquel ils complètent leur salaire par des revenus complémentaires non taxés. À court terme, cela leur rapportera davantage et pour les autorités, les recettes fiscales diminueront en effet.

À long terme, cela signifie que les personnes qui font ce choix se constitueront moins de droits de pension. Nous doutons donc fortement que la mesure conduira à un changement de comportement massif des travailleurs.

La crainte liée à la concurrence déloyale pour le secteur professionnel est également infondée. En premier lieu, je pense à la nature et à la taille limitée des activités qui entrent en considération : il s’agit vraiment de revenus complémentaires spécifiques et d’ampleur limitée.

La mesure s’adresse à des personnes qui ne constituent pas une menace pour le secteur professionnel.

Ensuite, précisément pour empêcher cette concurrence déloyale, des limitations supplémentaires sont également imposées. Ainsi, les personnes qui désirent avoir des revenus complémentaires n’ont pas le droit, de quelque manière que ce soit, de faire de la publicité pour leurs services. Ensuite, je désire aussi souligner que nous nous adressons à des personnes qui ne constituent vraiment pas une menace pour le secteur professionnel.

Des employés qui travaillent au moins à ? ne peuvent investir qu’une quantité limitée de temps dans leur activité complémentaire. Les indépendants n’ont pas le droit de fournir le même travail pour leurs revenus complémentaires que pour l’exercice de leur activité principale. Et les limitations imposées aux chercheurs d’emploi pour faire usage du système sont également largement suffisantes.

La critique selon laquelle la mesure conduirait à une marchandisation du travail bénévole est également à côté de la question. En premier lieu, les rémunérations dont il est question sont entièrement facultatives. Deuxièmement, ce n’est pas comme si les ASBL étaient pleines aux as. Leurs membres ne vont donc pas maintenant subitement demander et obtenir une rémunération pour l’ensemble de leur travail.

En règle générale, les objections qui sont exprimées actuellement ne sont pas seulement infondées, mais aussi prématurées. Je voudrais souligner qu’il ne s’agit pour l’instant que d’un projet de loi, approuvé une première fois par le conseil des ministres le 27 octobre. Après avis du Conseil d’État, le projet sera à nouveau examiné par le conseil des ministres et le parlement. Autrement dit, le projet de loi est prêt, mais il doit encore être perfectionné.”

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