Combien coûtent les alternatives à la viande dans les supermarchés ?

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Ilse De Witte Journaliste chez Trends Magazine

Les scandales dans l’industrie de la viande poussent un nombre croissant de consommateurs à se tourner vers des alternatives.

Il y a de plus en plus de magasins de proximité qui vendent les produits de fermiers locaux, voire de de fermes qui permettent au consommateur d’acheter directement leurs produits. À l’AD Delhaize de Hoeilaart, on retrouve ainsi la viande de Hubert De Rijcke, un éleveur de bovins limousins de la commune qui cultive lui-même la nourriture qu’il donne à ses animaux. Il s’agit d’un exemple parmi tant d’autres des initiatives à petite échelle en vue de raccourcir la chaîne. Un nombre croissant de clients sont en effet prêts à payer un peu plus contre la garantie d’une meilleure qualité et d’une histoire solide pour l’étayer.

Autre exemple et non des moindres : le site web Notrevache.be créé par David De Keyser, fils et petit-fils de bouchers qui a vu son métier passer de l’artisanat à l’industrie. “À 18 ans, je n’avais aucune envie de m’investir dans l’entreprise familiale”, reconnaît-il. David De Keyser est donc devenu pilote, mais les gènes ont fini par parler et en mai 2014, il s’est mis à vendre de la viande de boeuf sur Internet pendant son temps libre.

Un nombre croissant de clients sont prêts à payer un peu plus contre la garantie d’une meilleure qualité et d’une histoire solide pour l’étayer

“C’est par nostalgie et non par appât du gain que je me suis lancé. En consultant les étiquettes de la viande vendue dans les supermarchés, on se rend compte que celle-ci contient beaucoup d’eau et toutes sortes d’additifs, les fameux numéros E. Je suis nostalgique du goût qu’avait la viande à l’époque de mon grand-père.”

Le concept de Notrevache.be s’inspire d’une tradition vieille comme le monde : la vache n’est abattue que s’il y a suffisamment de candidats-acheteurs pour se partager l’intégralité de la viande. Celui qui a un parent fermier ou boucher se souvient probablement de l’abattage de la vache de la famille dont les membres se répartissaient la viande ou encore du remplissage des saucisses.

Mais la plateforme en ligne souffle un vent nouveau : la vente a lieu sur Internet, ce qui traduit une certaine prise de conscience. C’est seulement quand la vache a été achetée à 100 % que la viande est livrée à domicile dans des emballages sous vide qui peuvent être stockés au réfrigérateur ou au surgélateur. La symbolique est toute autre : on n’a pas affaire à un simple hamburger, mais au morceau d’une bête dont on s’efforce de vendre chaque partie.

(Faire) abattre

En Belgique, l’abattage de bovins ne peut avoir lieu que dans un abattoir agréé. Cette règlementation ne s’applique pas aux porcs, aux ovins, aux caprins, aux lapins, à la volaille ni au gibier d’élevage à condition qu’ils soient anesthésiés au préalable, que leur viande ne soit pas destinée à la commercialisation et que la personne qui se charge de l’abattage ne soit pas un amateur. Mis à part pour les lapins et la volaille, il est indispensable de se faire préalablement enregistrer auprès de la commune ou de l’Agence Fédérale pour la Sécurité Alimentaire.

Tout propriétaire d’une vache peut se rendre dans un abattoir. Certains établissements refusent les animaux des particuliers pour éviter un surcroît de paperasses, mais les abattoirs publics les acceptent la plupart du temps.

Faire abattre un bovin n’est pas hors de prix. L’abattoir public que nous avons contacté demandait seulement 140 euros, majorés de 10 cents par kilo au-delà de 300 kilos. C’est l’élevage des animaux qui génère les coûts les plus élevés. Un bovin ne vit pas que d’herbe et de foin. Sur la base d’un coût de 3 à 4 euros par jour en nourriture, l’investissement à consentir est de 2.880 euros à 5.760 euros pour une durée de vie respective de deux à quatre ans.

Des entreprises comme Notrevache.be offrent une solution à ceux que l’idée de l’abattage rebute et qui défendent une approche plus raisonnée en matière de consommation de viande. Cette plateforme en ligne propose à la vente des morceaux de quatre races bovines : Limousine, Brasrund, Black Angus et Holstein. Un colis comprend différents morceaux, de l’entrecôte au rosbif en passant par le hachis pour un prix oscillant entre 13,5 et 15,6 euros le kilo, en fonction de la race. Une bête permet à David De Keyser de composer entre 30 et 35 colis.

Tout propriétaire d’une vache peut se rendre dans un abattoir

Il vend également du poulet et du porc, ainsi que des colis combinant viande de boeuf, de porc et de volaille. Avec les restes, il prépare de la nourriture pour les animaux domestiques. “Cela ne me dérange pas qu’on copie mon idée, au contraire. Un tel concept ne fonctionne qu’à petite échelle. Je suis satisfait de mes 10.000 clients, dont près de 94 % passent une nouvelle commande dans les trois mois”, conclut-il.

Alternatives végétariennes

D’après les conclusions d’une enquête menée l’année dernière par le bureau d’études de marché GFK, la vente de substituts de viande dans les supermarchés belges a le vent en poupe. Les dépenses en tofu, quorn, seitan et autres alternatives végétariennes ont progressé de 40 % par rapport à 2014. “Nous entendons le même son de cloche de la part des supermarchés”, affirme Melanie Jaecques, collaboratrice de projet au sein de l’asbl EVA (Éthique Végétarienne Alternative). “Le nombre croissant d’inscriptions à nos ateliers témoigne également de cet intérêt croissant pour les produits végétariens et végétaliens.”

Malgré leur popularité croissante, les substituts de viande représentaient à peine 1 % de notre assiette en 2017

Les supermarchés élargissent constamment leur offre de produits végétariens. Des spécialistes comme La Boucherie Végétarienne ne sont plus les seuls acteurs sur le terrain. L’année dernière, un producteur de charcuteries classiques comme Aoste a en effet introduit des produits végétariens dans sa gamme.

Malgré leur popularité croissante, les substituts de viande représentaient à peine 1 % de notre assiette en 2017. Les Belges consomment beaucoup moins de viande de boeuf et de porc qu’il y a dix ans, mais cette dernière s’attribue toujours la plus grosse part du gâteau avec 54 %. Par ailleurs, la volaille et le gibier ont également vu leur part dans la consommation totale des ménages en viande, substituts de viande, poisson, volaille et gibier grimper de 25 à 30 %.

Un prix abordable

“Une alimentation végétarienne ou végétalienne ne doit pas forcément coûter plus cher qu’un régime carné”, poursuit Melanie Jaecques. “Tout comme la viande, l’offre comprend des produits dans toutes les gammes de prix. Un plat à base de légumineuses est très bon marché. Si vous y ajoutez du quorn, le prix sera un peu plus élevé.” Il y a quelques années, EVA a lancé des ateliers pour les personnes au budget limité afin de balayer le préjugé selon lequel manger végétarien coûterait plus cher. “Nous avons développé de délicieuses recettes qui peuvent être préparées pour 1 à 3 euros par personne.”

Une alimentation végétarienne ou végétalienne ne doit pas forcément coûter plus cher qu’un régime carné

Originaire du Yorkshire du Nord, le quorn est élaboré à partir d’une moisissure riche en protéines. Ce substitut de viande introduit en 1985 sur le marché britannique a débarqué en 1991 en Belgique. En comparaison de la viande de boeuf, de porc et de volaille, ce produit végétarien réputé cher se situe en réalité dans la moyenne au niveau du prix au kilo.

Il ressort d’une étude menée par l’Association néerlandaise de défense des consommateurs que les substituts de viande font de plus en plus honneur à leur nom. Les alternatives à base de soja sont les plus proches de la viande en termes d’éléments nutritifs. Leur teneur en protéines s’établit à 16 g pour 100 g. Le quorn fait un peu moins bien avec 12,6 g et le falafel est le moins bon élève avec 5,3 g. Selon nous, les burgers aux légumes qui atterrissent de temps en temps dans l’assiette des végétariens ou des végétaliens ne remplacent pas la viande. Enfin, l’association de consommateurs souligne que les substituts de viande sont cinq fois moins nocifs pour l’environnement.

VIANDE OU SUBSTITUTS DE VIANDE: COMPARAISON DE PRIX

Source : Collect&Go

Prix/kg

Filet de poulet 5,77

Hachis de porc préparé 4,10

Hamburger 6,06

Hachis de poulet préparé 6,98

Hachis porc + boeuf préparé 7,38

Falafel 9,29

Burger végétarien à base de soja 12,28

Colis boeuf-porc-poulet de Notrevache.be 12,74

Bifteck catégorie 2 12,98

Rumsteak 13,74

Filet de quorn 14,42

Côte d’agneau 14,65

Colis de viande de boeuf le plus cher de Notrevache.be 15,57

Bifteck pelé catégorie 1 16,80

Rosbif 16,80

Bifteck Chateaubriand 16,83

Rumsteak bio 19,95

Côte à l’os filet pur 29,9

Traduction : virginie·dupont·sprl

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