Niels Saelens

Pouvoir d’achat: nos comportements d’épargne nous coûtent très cher

Niels Saelens Rédacteur Moneytalk.be

Selon l’Institut syndical européen (ETUI), le Belge est le seul Européen à perdre du pouvoir d’achat. Mais cette étude n’est pas totalement le reflet de la réalité.

Mardi, De Morgen et De Standaard remettaient l’étude de l’ETUI en question. Selon cette étude, le Belge a perdu l’an dernier 0,94% de son pouvoir d’achat. Ce qui ne signifie pas que nous avons souffert d’une perte de salaire. Nous avons simplement observé une trop faible augmentation de notre salaire pour compenser l’inflation.

Dans la période de 2008 à 2016, l’inflation en Belgique était de 1,5%, contre 1,1% dans les trois pays voisins. C’est la raison pour laquelle le ministre de l’Économie Kris Peeters (CD&V) a donné la mission à un groupe de travail de mener une recherche pour détecter les raisons de la rapidité de la hausse des prix dans notre pays. Il en ressort que les visites au restaurant ou au café, les télécoms et les services culturels contribuent en large mesure à la hausse plus élevée des prix des services en Belgique que dans les principaux pays voisins.

Critères différents

Le rapport de l’ETUI a fait beaucoup de bruit dans les médias sociaux. La N-VA a dès lors brandi les chiffres de la Banque Nationale sur Twitter afin de démontrer que le Belge gagne au contraire en pouvoir d’achat.

Selon ces chiffres, le pouvoir d’achat du Belge augmentera d’1,3% cette année et d’1,4% l’an prochain en conséquence des réformes du gouvernement Michel. Il s’agit bien sûr de prévisions. Le Bureau fédéral du Plan a récemment également publié un chiffre plus optimiste que l’ETUI. Selon le Bureau, nos salaires ont augmenté d’1% l’an dernier.

D’où vient cette différence ? Comme les services d’étude appliquent des critères différents, ils arrivent par conséquent à des résultats différents. L’étude de l’Institut syndical européen (ETUI) tient ainsi uniquement compte des salaires bruts et de leur comportement par rapport à l’inflation. Le Bureau fédéral du Plan observe le revenu disponible réel. Ce dernier augmente à mesure que davantage de personnes accèdent à un travail. Ensuite, le Bureau du plan tient compte des revenus nets disponibles.

En d’autres mots, le Bureau fédéral du Plan met en lumière les mesures que le gouvernement fédéral a prises pour augmenter notre revenu net. “Le pouvoir d’achat a été d’une part soutenu par une croissance nette significative de l’emploi, mais d’autre part freiné par une poursuite de la diminution des revenus du capital. Un certain nombre de mesures (comme l’augmentation des frais professionnels forfaitaires) ont eu un impact favorable sur le pouvoir d’achat, mais celui-ci a été partiellement contrebalancé par une augmentation de la TVA sur l’électricité à usage domestique, l’augmentation des impôts indirects et le saut d’index notamment”, ressortait-il le mois dernier dans le rapport.

Les comportements d’épargne grignotent le pouvoir d’achat

Chez les épargnants traditionnels, nous constatons une certaine crainte du risque par rapport à une transition vers les investissements

Et l’avenir ? Il paraît de toute façon plus optimiste pour les Belges. Les partenaires sociaux ont ainsi décidé que notre salaire pourrait augmenter de maximum 1,1% au-dessus de l’indexation (2,9%) au cours des deux prochaines années. Nous risquons néanmoins une perte de pouvoir d’achat si nous plaçons massivement cet argent sur des livrets d’épargne. Tant que le taux d’intérêt n’augmente pas et que l’inflation frise les sommets, nous nous appauvrissons à chaque euro que nous déposons à la banque. En février, le taux d’intérêt réel – la différence entre le taux d’intérêt sur l’épargne et l’inflation – était de -2,86%. Si l’inflation (2,97%) et le taux d’intérêt sur l’épargne (0,11%) restent au même niveau pendant toute l’année, l’épargnant perdra 286 euros par tranche de 10.000 euros d’épargne.

La faiblesse des taux ne décourage pas le Belge. La première banque du pays BNP Paribas Fortis a même observé une augmentation de 5,8% du nombre de dépôts dans notre pays l’an dernier, à 116 milliards d’euros. C’est ce qui ressort du rapport annuel de la banque. “Nous constatons chez les épargnants traditionnels une certaine crainte ou aversion du risque par rapport à la transition vers les investissements. Pour les produits avec garantie du capital, le rendement est plutôt faible et on doit également tenir compte des frais”, explique Hilde Junius, porte-parole chez BNP Paribas Fortis.

Dans De Morgen, le fiscaliste Michel Maus met également en garde contre les conséquences néfastes de notre comportement d’épargne. Le danger est selon lui que le pouvoir d’achat – en combinaison avec des prix élevés pour les télécoms et l’énergie – rongera la consommation. “Certainement si les Belges laissent massivement leur argent dormir sur leur livret d’épargne”, ressort-il.

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