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“Le revenu cadastral n’a plus aucune connexion avec la valeur locative”

D’après Luc Maes, professeur en droit fiscal à l’Université d’Anvers et à la KU Leuven, le revenu cadastral n’a plus aucune connexion avec la valeur locative. “Le monument a besoin d’une rénovation en profondeur“, écrit-il.

Le revenu cadastral est à nouveau sous les projecteurs. Il faut dire que c’est un vrai monument. Le cadastre, comme inventaire des biens immobiliers, est une initiative qui date de Napoléon. La liaison au revenu estimé du bien immobilier remonte à 1930. A chaque bâtiment ou terrain, fut attribué un revenu sensé refléter la valeur locative du bien. En 1962, les revenus cadastraux ont été adaptés une première fois aux prix du marché locatif, qui remontent à 1955. En 1975, une étude des prix locatifs fut à nouveau entreprise. Il s’en suivit de nouveaux revenus cadastraux, adaptés pour le prélèvement fiscal à partir de 1980.

En bref, le revenu cadastral est désuet et fictif

En 1930, le législateur avait attribué une durée de validité de vingt ans aux revenus cadastraux. En 1980, on a trouvé qu’une révision tous les dix ans serait mieux. Mais cette révision n’a encore jamais été mise en oeuvre. Les biens immobiliers qui existaient en 1975, n’ayant depuis lors subi aucun changement majeur, ont donc le même revenu cadastral depuis 35 ans. De plus, les biens immobiliers construits aujourd’hui se voient attribuer un revenu cadastral basé sur les prix locatifs de 1975 dans leur commune ou leur quartier.

Il s’en suit que le revenu cadastral n’a aujourd’hui plus aucune connexion avec la valeur des loyers. Les prix locatifs ont évolué, le caractère de la région a changé,… Les aménagements de fortune comme l’indexation annuelle du revenu cadastral sont insuffisants pour remédier à la rupture avec la réalité.

En bref, le revenu cadastral est désuet et fictif. Il ne cadre plus avec l’image actuelle d’un gouvernement qui se veut plus efficace dans l’organisation des contrôles et qui conclut des accords internationaux afin de déterminer le plus correctement possible le revenu imposable d’un contribuable. Cela fait déjà des années que l’on sait qu’un changement est indispensable.

Quelle est la solution ? Le Conseil Supérieur des Finances a récemment fait une étude sur un prélèvement d’impôts en fonction du revenu immobilier réel. Mais selon les récents communiqués dans les médias, le ministre des Finances n’exclut pas la possibilité de maintenir le système actuel, mais avec un revenu immobilier estimé de manière réaliste. Il investigue la faisabilité et les coûts d’un tel système.

Une révision du revenu cadastral conduira-t-elle à une forte augmentation des impôts ? Cela n’est certainement pas à exclure. Mais cette augmentation ne doit pas nécessairement être proportionnelle à l’ajustement du revenu cadastral. On pourrait envisager de taxer les revenus des placements immobiliers de la même manière que les revenus du capital : à 25 pourcents. Les régions et les autorités locales qui déterminent ensemble le tarif total du précompte immobilier, pourraient également ajuster leurs tarifs. Il s’agit essentiellement d’une question de responsabilité politique des autorités compétentes.

Le revenu cadastral est très souvent une source de traitement inéquitable

Mais si le but est de ne pas augmenter le taux d’imposition, pourquoi voudrions-nous modifier les revenus cadastraux ? Première raison : un système qui prétend appliquer le principe de proportionnalité doit se baser sur les revenus réellement perçus ou déterminés suivant des normes les plus réalistes possibles.

Deuxième raison: le revenu cadastral est très souvent une source de traitement inéquitable. Un propriétaire qui loue un appartement avec un revenu cadastral de 1000 euros, à une famille pour un loyer de 500 euros par mois, paie un impôt basé sur un revenu du loyer de 2.380 euros. Si le locataire est un entrepreneur ou une société, le montant du loyer reçu sur lequel se base l’impôt devient 3.600 euros. Si le locataire est une société qui met l’appartement gratuitement à disposition d’un dirigeant d’entreprise, ce dernier reçoit alors un salaire complémentaire sous la forme d’un avantage en nature. Le montant imposable de cet avantage est calculé en fonction du revenu cadastral revalorisé de l’habitation. Concrètement, dans cet exemple, le chef d’entreprise sera imposé sur un avantage d’environ 10.700 euros, alors que le prix normal du loyer de l’appartement est de 6.000 euros.

On constate clairement que le monument du revenu cadastral doit profondément être rénové.

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