Le seuil pour bénéficier d’une exemption TVA a été abaissé

Récupérer les 21% de TVA y compris pour les petits achats. Pour les touristes non européens, pouvoir bénéficier d'un "tax free shopping" est un élément déterminant dans le processus d'achat. © Belgaimage

La limite pour effectuer des achats exemptés de TVA a été abaissée à 50 euros, contre 125 euros précédemment. La mesure est censée favoriser les achats des touristes non européens.

“Cette nouvelle mesure permettra de raviver l’attrait des touristes non européens pour venir faire du shopping dans notre pays et donnera un coup de pouce au secteur du tourisme “, annonce le cabinet du ministre des Finances. Et ce sont bien 75 euros qui feront toute la différence.

Comment ? En faisant passer de 125 à 50 euros le seuil pour bénéficier d’une exemption de taxe sur la valeur ajoutée en Belgique, le gouvernement espère bien rendre plus attractif le shopping pour les touristes non européens. Si ceux qui résident en dehors de l’espace européen (le principe de la détaxe ne s’applique pas au sein de l’Union) peuvent se faire rembourser le montant de la TVA pour des montants plus faibles, les achats effectués dans notre pays deviennent de fait immédiatement plus intéressants et devraient attirer plus de touristes. Ensuite, qui dit plus de touristes dit plus de dépenses globales et donc plus de recettes pour l’horeca. Tout le monde en sort gagnant. Même le budget fédéral, car le cadeau supplémentaire fait aux voyageurs étrangers doit théoriquement être compensé par l’augmentation des dépenses.

Est-ce que ça marche ?

La décision du Conseil des ministres d’abaisser le montant minimum d’achats exemptés de TVA effectués dans notre pays par les touristes non européens n’est pas une révolution en soi. En réalité, avec cette diminution de 75 euros, la Belgique tend plutôt à s’aligner sur ses voisins que de se placer en tête des pays les plus attractifs. Avec un minimum de 125 euros pour prétendre à ce remboursement, la Belgique trônait de fait au quatrième rang de la limite la plus élevée d’Europe, faisant figure de quatrième pays le plus cher. En l’abaissant à 50 euros, elle rejoint les pays voisins comme les Pays-Bas ou l’Allemagne.

Certes, il est trop tôt pour donner des chiffres officiels, ” mais des chaînes comme Inno ou H&M voient déjà la différence “, soutient Jorn Hoogestijn, directeur de Global Blue pour le Benelux. Et à en croire l’expérience de la société qui a créé le concept de Tax Free Shopping il y a une trentaine d’années afin de faciliter la récupération de la TVA pour les voyageurs, diminuer le seuil de remboursement pour encourager le tourisme fonctionne plutôt bien. ” Nous avons vu dans de nombreux pays qu’une diminution du seuil de remboursement de la TVA crée l’environnement adéquat pour attirer et encourager les achats. Les pays avec des seuils plus bas ou ceux qui les ont diminués ces dernières années, comme les Pays-Bas qui a diminué son seuil à 50 euros il y a 10 ans déjà, l’Allemagne, le Royaume-Uni, Chypre ou l’Estonie, ont constaté un accroissement significatif des achats par des touristes non européens (+ 300 %), qui soutient directement les détaillants “, explique Cristian Samoilovich, directeur des affaires publiques chez Global Blue.

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, il n’y a pas que pour les produits de luxe qu’on fait les démarches pour être exempté de la TVA domestique.

Et cette fois-ci, la mesure devrait être bénéfique pour tout le monde. Pour soutenir un secteur à la peine, des décisions régionales avaient déjà été prises, notamment une exonération des taxes hôtelières pour toute l’année 2016 à Bruxelles, histoire d’aider les établissements qui ont enregistré une baisse de fréquentation de 20 % (au moins) cet été. Mais les commerçants souffraient aussi de la baisse de fréquentation. Avec la dernière mesure en date, c’est un cercle vertueux qu’on tente de créer en attirant les touristes lointains. ” Les touristes non européens apportent une contribution importante dans tous les secteurs, depuis les magasins de textile en passant par les supermarchés, les boutiques de cadeaux et de musées, les chocolatiers et jusqu’aux établissements horeca “, avance le cabinet de Johan Van Overtveldt.

Du luxe aux produits de base

Car contrairement à ce que l’on pourrait croire, il n’y a pas que pour les produits de luxe qu’on fait les démarches pour être exempté de la TVA domestique. ” Aux Pays-Bas, où la limite est passée à 50 euros il y a quelques années, on a observé une augmentation de 40 % des petits achats “, constate Jorn Hoogestijn. Preuve que tous les produits destinés à l’exportation bénéficient de cette mesure : la chaîne Inno qui n’est pourtant pas spécialisée dans les produits très haut de gamme a déjà ressenti l’impact : ” les transactions liées aux touristes ont été plus nombreuses depuis que le montant minimum est passé à 50 euros et ceci malgré le climat difficile. Nous pouvons même dire que nous rencontrons un public touristique plus large grâce à cette diminution “.

Porter à 50 euros minimum les achats sur lesquels les touristes chinois ou américains peuvent récupérer la TVA une fois le bureau de douane franchi, c’est donc aussi favoriser les boutiques qui vendent des produits plus modestes. Les gift shops de musées notamment, qui offrent rarement des souvenirs dépassant ce montant devraient connaître une croissance de leur chiffre d’affaires dans les prochains mois.

L’idée de pouvoir récupérer les 21 % qui constituent la TVA en Belgique, y compris pour des petits achats, va certainement faire son chemin parmi les touristes non européens. Pour certains touristes chinois, pouvoir bénéficier d’un tax free shopping est un élément déterminant dans le processus d’achat. Surtout que la lourdeur administrative pour récupérer le montant de la taxe dont un consommateur étranger n’a théoriquement pas à s’acquitter (puisque le lieu de consommation du produit acheté ne sera pas la Belgique) tend à diminuer. Avec le principe du Tax Free Shopping, Global Blue planche par exemple sur une version automatisée et digitalisée du remboursement de la TVA aux touristes.

Tourisme d’affaires

Alors si le secteur du tourisme pleure son été, tout espoir n’est donc pas perdu pour autant. Car juillet et août sont certes des mois importants, mais ils attirent principalement des touristes proches, c’est-à-dire surtout ceux qui résident au sein de l’Union européenne. Et pour eux, le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée sous prétexte que le bien sera consommé hors du pays ne s’applique pas. Seules les personnes provenant de l’extérieur de l’Union européenne sont éligibles. Cela tombe bien, ceux-ci ont plutôt tendance à visiter la Belgique pendant les mois de mars et avril ou entre septembre et novembre, avec le tourisme d’affaires. Juste à temps pour bénéficier de la dernière mesure de soutien à l’économie approuvée mi-septembre.

Un touriste chinois par exemple, visiteur le plus dépensier avec les Américains et les Russes, passe en moyenne 10 jours en Europe lorsqu’il y voyage. Les visites sont réparties sur plusieurs pays, mais il consacre surtout 80 % de son temps aux achats pour un montant total qui avoisine généralement les 700 euros sur tout le séjour. Et ce voyageur-là est bien informé. Les achats plus modestes qu’il effectuait jusqu’ici aux Pays-Bas parce qu’il y bénéficiait d’une exemption de TVA, il pourra désormais les transférer en partie en Belgique. Et il y a de la marge, car au classement Global Blue des villes les plus attractives pour y faire du shopping, Bruxelles, 15e, est loin derrière Londres, Madrid, Barcelone ou Paris. En France pourtant, le seuil minimum pour prétendre à une exemption de TVA est encore de 175 euros. Mais le pays qui a enregistré une baisse de 20 % des ventes liées au service de taxfree planche sérieusement sur la question.

Par Morgane Kubicki.

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