La renégociation d’un crédit hypothécaire, pas donnée à tout le monde

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Ilse De Witte Journaliste chez Trends Magazine

Le business model des banques se retrouve sous pression à cause des refinancements massifs des crédits d’une part et des taux d’intérêt minimums sur les livrets d’épargne d’autre part. Mais tous les consommateurs n’ont de loin pas pu bénéficier de la forte diminution des taux hypothécaires, alors qu’ils ont cependant vu les rendements sur leur épargne diminuer année après année.

Pour les personnes sans dettes, les taux d’intérêt historiquement bas n’ont de toute manière que des désavantages. Même celles qui ont des dettes n’ont pas toujours la possibilité de négocier des taux plus bas. Les personnes qui ont un crédit hypothécaire avec une durée restante inférieure à dix ans se trouvent souvent prisonnières de leur banque.

Pour être un plus clair, prenons un exemple concret. Si pour l’achat ou la rénovation d’un logement, vous allez chez Crelan pour démarrer un nouveau crédit sur dix ans, vous payez un taux inférieur à 1%. Du moins si vous possédez des parts coopératives de la banque et que vous pouvez soumettre de bonnes lettres de créance. La banque offre probablement les tarifs les plus agressifs du moment.

Une personne ayant contracté un crédit hypothécaire il y a quatre ans dans la même banque payait 2,55% sur dix ans. Nous parlons d’une réduction de plus de la moitié du taux d’intérêt. A titre de comparaison: le taux de base sur le livret d’épargne classique de Crelan a diminué de 1% au cours des 4 dernières années, pour atteindre 0,05%. Au cours de la même période, la prime de fidélité est passée de 0,25% à 0,1%. Les épargnants reçoivent – additionné – 1,1% moins d’intérêts sur leur compte qu’en 2012.

Pas en position de force à la table de négociation

Un esprit soupçonneux oserait penser que le législateur veut aider les banques à prendre les clients en otage

Il est grand temps d’aller renégocier ces “vieux” crédits hypothécaires, entendons-nous dire. Les personnes qui ont un crédit avec une durée aussi courte ne sont toutefois pas suffisamment fortes à la table de négociation.

Vous pouvez aller dans une autre banque, mais le taux inférieur que vous pourrez négocier dans celle-ci pour la période restante (six ans dans notre exemple) ne couvre pas les frais de ce qu’on appelle un refinancement externe. Vous devez notamment passer chez le notaire pour faire annuler l’ancienne hypothèque et faire inscrire la nouvelle hypothèque. Vous payez aussi à nouveau les droits d’enregistrement. Les coûts de ceux-ci atteignent rapidement quelques milliers d’euros, en fonction du montant dont il s’agit. Les frais pour un refinancement interne – auprès de votre propre banque – sont limités à une indemnité de remboursement anticipé (maximum trois mois d’intérêt) et quelques centaines d’euros de frais de dossier.

Test-Achats plaide pour que tant les frais de notaire que l’indemnité de remboursement anticipé (aussi appelée indemnité de remploi) soient restreints. Pourquoi votre maison doit-elle par exemple être à nouveau évaluée si vous changez de banque? L’ancienne hypothèque suffisait comme garantie pour le remboursement de votre ancien crédit hypothécaire. Autant d’années plus tard, la valeur de la maison a probablement augmenté et la valeur résiduelle du crédit a sans aucun doute baissé. Un esprit méfiant oserait penser que le législateur veut aider les banques à prendre les clients en otage. Car d’autres conditions permettent en outre aux banques de ligoter leurs clients: l’assurance solde restant dû et l’assurance incendie obligatoirement auprès de la même banque, etc.

Les marges bénéficiaires des banques

Il y a très peu de chance que le législateur belge introduira une protection supplémentaire pour les preneurs de crédits logement

Déjà maintenant, les banques se plaignent amèrement qu’elles voient leurs marges bénéficiaires se ratatiner, parce qu’elles ne peuvent pas totalement répercuter la baisse des taux hypothécaires sur leurs épargnants. Pour simplifier, les banques obtiennent de l’argent de la part des épargnants, avec lequel elles octroient des crédits, et elles mettent la différence dans leur poche. Il y a aujourd’hui plus de 262 milliards d’euros sur les livrets d’épargne règlementés. Les banques doivent payer au moins 0,01% de taux de base comme rémunération pour l’argent de l’épargne et 0,1% de prime de fidélité si l’argent reste plus d’un an auprès de la même banque. Elles paient aussi des taxes en fonction de l’argent sur les livrets d’épargne, des contributions au fonds de protection belge et européen pour les épargnants et elles doivent garder une partie de l’argent de l’épargne en réserve.

Autrement dit, il y a très peu de chance que le législateur belge introduira une protection supplémentaire pour les preneurs de crédits logement ou des mesures supplémentaires pour faciliter le shopping entre les banques pour les emprunteurs.

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