A la recherche du rendement perdu…

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Les rendements sont retombés vers des niveaux historiquement bas. Les investisseurs doivent désormais se tourner vers des alternatives aux placements obligataires traditionnels.

Entre 2016 et 2018, la force de l’économie américaine avait stimulé un redressement spectaculaire du rendement à 10 ans de 1,4% jusqu’à plus de 3,2%. Depuis, la guerre commerciale provoquée par la présidence américaine et les craintes d’un ralentissement économique aux Etats-Unis ont poussé la Réserve fédérale à adopter une attitude plus dovish, avec un mouvement de baisse du taux directeur qui a été enclenché au milieu de l’été 2019. Et du côté européen, la Banque centrale européenne va remettre le pied sur l’accélérateur monétaire durant les prochains mois, en particulier si la croissance venait à flancher trop fortement.

Frank Lipowski (Flossbach von Storch):
Frank Lipowski (Flossbach von Storch): “L’investisseur obligataire se doit aujourd’hui d’être plus actif.”© PHOTOS PG

Rendements négatifs

Le taux américain à 10 ans est aujourd’hui retombé pratiquement au niveau du début 2016, et le nombre d’obligations souveraines des pays développés affichant un rendement négatif a atteint de nouveaux records. Alors que les bilans des banques centrales s’étaient fortement contractés en 2018 (suite à la baisse des rachats d’actifs aux Etats-Unis), la tendance s’est inversée durant les derniers mois.

Les taux souverains sont appelés à rester bas dans les grands pays développés, et même à se dégrader encore durant les prochains mois si une récession plus ou moins généralisée venait à pointer le bout de son nez. Seulement un tiers des indices manufacturiers affichent actuellement un chiffre supérieur à 50 dans les pays développés, soit un niveau signalant traditionnellement une poursuite de l’expansion économique.

Dans son plus récent Bond Bulletin, les experts obligataires de JP Morgan Asset Management constatent que ” les taux sont aujourd’hui environ 1% plus bas qu’au début de l’année, tant en Europe qu’aux Etats-Unis “. Ce recul généralisé des rendements s’explique notamment par la crainte d’un environnement qui deviendrait récessif au niveau global, car un tel scénario est traditionnellement très négatif pour les actifs risqués (actions, obligation à haut rendement, etc.).

Dilemme

A l’inverse, les actifs qui résistent le mieux dans ces circonstances sont (notamment) les obligations souveraines, les placements monétaires ou la dette d’entreprise de qualité. Le début du mois de septembre a d’ailleurs été marqué par une activité très soutenue pour ce dernier segment, tant en Europe qu’aux Etats-Unis. Ceci démontre que le marché obligataire reste clairement à la recherche de papier offrant un rendement attractif avec moins de risque.

Dans ce contexte de taux appelés à rester déprimés, les investisseurs se retrouvent face à un dilemme familier : prendre plus de risque pour dégager davantage de rendement pour leur épargne, ou se mettre à l’abri sur des actifs peu rémunérateurs. ” Durant les prochaines années, dégager une performance positive sur un portefeuille obligataire va en effet s’avérer très difficile, constate Gareth Isaac, CIO fixed income chez Invesco. Même chez nos clients retail, la demande pour les produits obligataires s’est déplacée des fonds Core (investis en obligations souveraines des pays développés) vers les fonds qui adoptent une flexibilité très importante de leur allocation. ”

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Fondamentaux solides

Le contexte est également favorable à la gestion active des risques sur les marchés obligataires. Pour Gareth Isaac, ” l’environnement macroéconomique est devenu de plus en plus incertain, et le moindre tweet de Donald Trump provoque des remous sur l’ensemble du marché obligataire. Il s’agit d’une situation qui est absolument inédite dans l’histoire des marchés financiers. Un gestionnaire actif va toutefois être en mesure de profiter de ces pics de volatilité pour trouver des opportunités “.

” La plupart des investisseurs s’attendent désormais à ce que les taux restent bas ou continuent à baisser, ce qui est notre scénario central depuis plusieurs années, explique Frank Lipowski, gestionnaire du Flossbach von Storch Bond Opportunities. Si tout le monde venait à penser la même chose, il sera toutefois temps de redevenir plus prudent. L’investisseur obligataire se doit aujourd’hui d’être plus actif, et de savoir profiter des opportunités lorsqu’elles se présentent. ”

Equipes internationales

Dans ce contexte, les gestionnaires internationaux qui disposent d’équipes réparties sur l’ensemble de la planète ont un avantage certain sur ceux qui ne peuvent compter que sur une expertise régionale. Ils vont donc constituer l’essentiel du contingent des produits notés trois étoiles ou plus chez Morningstar dans la catégorie des fonds flexibles investis en obligations internationales (et couverts en euros). Un produit géré dans une boutique européenne bien connue des investisseurs belges est toutefois largement en tête du classement depuis le début de l’année : Flossbach von Storch.

Frank Lipowski, son gestionnaire, a la possibilité de prendre des décisions de gestion plus marquées. Il va par exemple se reposer sur une sélection étroite de positions (une soixantaine de lignes), avec une exposition importante sur le segment de la dette d’entreprise qui représente plus de 60% de l’allocation d’actifs. ” Nous privilégions les émetteurs de bonne qualité, avec notamment des noms tels que Philip Morris, Intrum, Netflix ou Medtronic “. Le solde des encours est réparti entre cash, dette gouvernementale et crédits hypothécaires.

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Géant international

La catégorie des fonds obligataires flexibles investis globalement est très hétérogène, avec des stratégies d’investissement qui pourront être plus ou moins agressives sur les marchés obligataires, et notamment sur l’exposition dans la dette d’entreprise ou les pays émergents. Parmi les grands fonds internationaux, PIMCO GIS Diversified Income parvient à se démarquer nettement avec une performance proche de 10% depuis le début 2019. Le produit est géré par une équipe de trois gestionnaires très expérimentés, supporté par une des plus importantes équipes obligataires au monde. Avec le produit frère PIMCO GIS Income, ce sont ainsi plus de 100 milliards de dollars qui sont gérés sur ces deux produits.

La stratégie d’investissement va partager les actifs sous gestion dans deux sections, qui vont permettre au portefeuille d’avoir une performance relativement stable quelles que soient les conditions du marché. ” Le fonds s’est positionné de manière défensive ces derniers temps, en diminuant l’exposition sur la dette d’entreprise la plus risquée et en prêtant une attention particulière à la liquidité des positions, estime Mara Dobrescu, analyste chez Morningstar, dans une étude publiée au début du mois de septembre. La stratégie comporte beaucoup d’éléments, mais peu de gestionnaires peuvent concurrencer PIMCO au niveau des ressources allouées dans le monde obligataire ” .

Cette plus grande prudence sur les segments les plus risqués de la dette d’entreprise se retrouve également chez Invesco Global Flexible Bond, le produit géré par Gareth Isaac. ” Notre portefeuille est principalement exposé sur la dette des pays émergents et sur les obligations d’entreprises. Nous avons toutefois réduit notre exposition sur les zones les plus risquées du haut rendement américain (notations CCC et inférieures), le mouvement de vente sur cette zone du marché semblant indiquer une dégradation rapide des attentes pour la croissance americaine. ”

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