Bitcoin: le nouvel or virtuel… et les dangers qui le guettent

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Le bitcoin, monnaie virtuelle, connaît un succès grandissant. Il affiche déjà une croissance de 450 % cette année. L’avènement du nouvel or pour les uns, une mode passagère pour les autres.

La somme rondelette de 4.500 euros. C’est ce que vous auriez aujourd’hui en poche si vous aviez acheté pour 1.000 euros de bitcoins en début d’année. Enfin, ” en poche ” n’est pas vraiment l’expression adéquate : tout comme les autres monnaies virtuelles, le bitcoin n’est rien de plus qu’un code informatique unique. Vous n’aurez donc jamais à proprement parler de bitcoins en poche.

Le succès du bitcoin et consorts – son concurrent, l’ethereum, a progressé de 3.000 % cette année – est dû en grande partie à sa popularité croissante en Chine. Les monnaies virtuelles créées et conservées dans un réseau informatique échappent au contrôle des autorités et des banques centrales. Les monnaies cryptographiques sont donc pour les Chinois le moyen idéal de contourner les contrôles de capitaux très stricts dans les pays communistes et de faire passer de l’argent à l’étranger en douce.

L’anonymat, même s’il n’est pas garanti à 100 %, et l’absence de contrôle titillent également l’imagination des hommes d’affaires peu scrupuleux. Le commerce des armes et des drogues prospère dans les coulisses d’Internet et se négocie en bitcoins notamment. Lors de la cyberattaque mondiale par le virus randsomware WannaCry au printemps dernier, les victimes ont été invitées à payer la ” rançon ” en bitcoins.

Implantation

Ceci dit, le succès du bitcoin ne s’explique pas uniquement par les pratiques illégales et les déviations financières. De la pizza à l’électronique en passant par les vacances à l’étranger, il est possible de payer à peu près tout en bitcoins aujourd’hui, en ligne surtout mais également dans certains magasins physiques. Les monnaies virtuelles entrent peu à peu dans les moeurs. Rien d’étonnant donc à ce que les banques centrales et les autorités dans le monde entier s’interrogent sur la meilleure façon d’endiguer le phénomène.

Qu’est-ce que le bitcoin ?

Le bitcoin est une monnaie numérique, un simple code informatique. Le système a été créé par Satoshi Nakamoto, une personne ou un groupe de personnes dont l’identité n’est pas avérée. A l’instar de l’argent papier, il n’a pas de valeur intrinsèque. La principale différence avec la monnaie classique est l’absence de contrôle par les autorités ou une banque centrale quelconque. Le nombre de bitcoins en circulation dépend du “minage”, une activité qui nécessite la puissance de calcul des ordinateurs et devient de plus en plus difficile. De ce fait, le nombre maximum de bitcoins est limité à 21 millions d’exemplaires. A l’heure actuelle, 16,5 millions de bitcoins circulent dans le monde, ce qui au cours actuel de 4.600 dollars équivaut à une valeur d’un peu plus de 75 milliards de dollars.

Le bitcoin suscite également l’intérêt du monde financier. L’absence de volatilité sur le marché des actions et des obligations ne fait qu’attiser sa popularité auprès des traders. Les fonds spécialisés ne datent pas d’hier. Un nombre croissant d’acteurs institutionnels comme les fonds de pension font aujourd’hui leurs premiers pas sur le marché. Certaines entreprises vont même jusqu’à lever des fonds via ce qu’on appelle un Initial Coin Offering (ICO), en référence à l’IPO ou introduction en Bourse.

Enfin, le cours des bitcoins évolue au gré des soubresauts politiques mondiaux. Chaque fois que le leader nord-coréen Kim Jong-un effectue un nouveau test de missile et suscite la fureur des grands de ce monde, le bitcoin prend un peu plus de valeur. Les investisseurs le considèrent en effet comme une valeur refuge, une assurance contre l’insécurité politique, au même titre que l’or ou les bons d’Etat allemands et américains.

L’absence de volatilité sur le marché des actions et des obligations ne fait qu’attiser la popularité du bitcoin auprès des traders.

De l’or ?

Le bitcoin n’est pas une entreprise et ne crée donc pas de valeur ajoutée. Pas question donc de dividende ni de coupon annuel. Il ne s’agit pas non plus d’un investissement classique comme une action ou une obligation. L’investisseur qui achète des bitcoins ne peut qu’espérer voir son cours augmenter.

C’est pourquoi le bitcoin est souvent comparé à l’or. Ils ont un point commun : leur quantité limitée. Leur rareté constitue un argument de poids pour de nombreux adeptes. Les banques centrales font en effet marcher la planche à billets à tout-va, ce qui selon les observateurs critiques ne peut qu’accélérer la dévalorisation de l’argent. Dans un récent rapport, la banque d’affaires américaine Morgan Stanley épingle toutefois une différence fondamentale : le bitcoin existe depuis moins de 10 ans alors que la valeur refuge de l’or est avérée depuis plusieurs milliers d’années. Ils n’offrent donc pas la même sécurité.

A tout le moins linéaire

Pour les nombreux initiateurs qui ont oeuvré au succès du bitcoin, la hausse est loin d’être terminée. Le cours enregistre effectivement une croissance linéaire depuis quelques années. Lors d’une première flambée en 2014, le bitcoin a grimpé jusqu’à quasi 1.000 dollars. Il a ensuite dégringolé à 200 dollars, un taux plancher qui a perduré un bon moment. Un achat mal programmé s’est donc soldé par une perte de près de 80 %.

En pratique

• Les bitcoins s’achètent sur une des nombreuses plateformes commerciales de monnaie numérique. Celles-ci renseignent le prix actuel qui peut varier d’une plateforme à l’autre.

• Les bitcoins peuvent s’échanger contre de l’argent comme des euros ou des dollars, contre des biens et des services.

• Les bitcoins se conservent dans un wallet, autrement dit un portefeuille numérique. Ils ne sont pas sur un compte titres.

• Chaque transaction est contrôlée par les autres utilisateurs et enregistrée dans un réseau d’ordinateurs d’utilisateurs, la fameuse blockchain (chaîne de blocs).

• La plus-value réalisée sur le bitcoin est exempte d’impôt sauf si les revenus sont générés par une activité commerciale en monnaie virtuelle.

Les records se sont succédé ces derniers temps. Et maintenant ? ” The trend is your friend “, dit un dicton selon lequel une hausse n’est pas nécessairement suivie d’un revirement. Mais tout investisseur un tant soit peu expérimenté sait que les arbres ne poussent pas jusqu’au ciel et encore moins les arbres numériques. Un sextuplement en moins d’un an fait irrémédiablement penser à une bulle spéculative.

Schisme

Les signes avant-coureurs d’une catastrophe imminente sont pourtant légion. Pas plus tard que le mois passé, un schisme s’est produit à Bitcoinland. La discorde concernait la technologie qui sous-tend la monnaie cryptographique et dont la capacité de traitement est limitée à un nombre restreint de transactions sur un court laps de temps. C’est pourquoi certains adeptes de la communauté ont lancé une alternative, le bitcoin cash, mieux adapté aux petites transactions.

D’autres dangers guettent le bitcoin. Il existe aujourd’hui plusieurs centaines de monnaies numériques. Il ne faudrait pas prendre à la légère ces concurrents qui affichent ouvertement leur ambition de détrôner le bitcoin. D’autres monnaies virtuelles comme le coinye, baptisée d’après le nom du rappeur américain Kanye West, sont nettement moins sérieuses. Cette croissance sauvage démontre toutefois une chose : la technologie blockchain a toutes les chances de se pérenniser tandis que l’avenir du bitcoin est tout sauf sûr.

Notons enfin un autre risque important. Mt. Gox, la plateforme d’échange de bitcoins jusqu’ici la plus importante, s’est brutalement effondrée en 2014. L’équivalent d’un demi-milliard de dollars en bitcoins est parti en fumée. Ce fut la débâcle liée aux monnaies virtuelles la plus médiatisée. Depuis lors, d’autres problèmes – plus ou moins temporaires – ont surgi. On entend régulièrement parler de voleurs numériques qui se volatilisent avec des bitcoins. Quid si un pirate d’un lointain pays disparaît dans la nature avec votre monnaie virtuelle ?

Les bitcoins de plus en plus visés par les hackers nord-coréens

La Corée du Nord est soupçonnée d’intensifier ses cyberattaques pour voler des monnaies virtuelles afin de récupérer des devises et contourner ainsi les sanctions de plus en plus fortes à son encontre, affirment par ailleurs des spécialistes du piratage informatique.

Depuis mai, des hackers nord-coréens ont mené au moins trois opérations contre des sites sud-coréens d’échange de crypto-monnaies, indique le cabinet FireEye, société de sécurité informatique, dans un rapport diffusé mardi.

Au moins une a vraisemblablement fonctionné quand quatre portefeuilles de la plateforme basée à Séoul, Yapizon, ont été compromis.

Les médias sud-coréens avaient rapporté en mai que 3.800 bitcoins avaient été volés à Yapizon, pour un préjudice estimé à 15 millions de dollars (12,5 millions d’euros).

Ha Tae-Kyung, parlementaire du parti d’opposition sud-coréen Bareun, estime que les hackers nord-coréens avaient tenté de voler 90 milliards de wons (66 millions d’euros) en Corée du Sud au cours des quatre dernières années avant juin 2017, au travers de cyberattaques ou d’attaques contre des distributeurs automatiques.

“La Corée du Nord vise les ‘marchés financiers de prochaine génération’ comme les devises virtuelles”, a-t-il déclaré aux journalistes la semaine dernière.

“Outre les sanctions imposées par l’ONU, la coopération internationale est nécessaire pour lutter contre les cyberattaques du Nord qui sont utilisées pour financer les programmes nucléaire et balistiques”, a-t-il dit.

La Corée du Sud est une des places les plus importantes au monde pour les monnaies virtuelles.

En juin, le site Bithumb a été la cible d’attaques informatiques, provenant potentiellement de la Corée du Nord, qui ont entraîné la divulgation des informations personnelles de 30.000 clients.

Environ 160 de ses clients préparent une action en justice en nom collectif (“class action”) contre Bithumb, affirmant avoir perdu environ 10 millions de dollars (près de 8,3 millions d’euros).

AFP

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