Jeff Mueller (Polen Capital): “Une stratégie éprouvée pour traverser les crises”

Gestionnaire pour Polen Capital, Jeff Mueller met en avant les avantages d’une stratégie d’investissement visant des tendances de croissance séculaires comme la transition digitale, le commerce sur Internet ou les paiements électroniques.

Polen Capital est un gestionnaire indépendant américain basé à Boca Raton (Floride) et spécialisé dans les fonds exposés sur les actions de croissance, avec une cinquantaine de milliards de dollars en actifs sous gestion. IM Global Partner (un réseau mondial d’investissement et de développement dédié à la gestion d’actifs soutenu notamment par Amundi) a pris une participation minoritaire dans Polen Capital en 2015.

Amundi Polen Capital Global Growth (Isin : LU1956955550) a été enregistré à la commercialisation en Belgique en 2019. Ce produit affiche cinq étoiles chez Morningstar avec une performance annualisée supérieure à 14% depuis le lancement du fonds en 2015. Nous avons récemment eu l’opportunité d’interviewer Jeff Mueller, le co-gestionnaire du fonds depuis 2013 au parcours pour le moins atypique. Ancien champion de tennis universitaire, il s’est engagé dans les U.S. Marines après les attentats du 11 Septembre. Pendant les années qu’il a passées à piloter des avions de chasse, il se découvre une passion pour l’investissement. Lorsqu’il revient à la vie civile au bout de 10 ans, il étudie à la Columbia Business School avant de rejoindre Polen Capital. L’autre gestionnaire du produit, Damon Ficklin, arrivé chez Polen Capital en 2003 et garant du processus d’investissement historique de la société, affiche pour sa part une expérience de 17 ans sur les marchés financiers.

Concentration

La philosophie d’investissement va pousser les deux gestionnaires à construire un portefeuille extrêmement concentré qui comportera typiquement entre 25 et 30 lignes, avec une croissance attendue du résultat supérieure à 15% sur un horizon de cinq ans. Ce niveau doit être atteint sur l’ensemble des positions, avec des valeurs à très forte croissance (comme Adobe) qui se retrouveront à côté de profils plus résilients (comme Nestlé ou LVMH). “Cette approche existe depuis la création de la société par David Polen en 1979”, explique le gestionnaire.

“Notre approche internationale nous permet aujourd’hui d’aller chercher les meilleures sociétés partout dans le monde, assure-t-il. Disposer d’un portefeuille concentré nous permet également d’avoir plus de certitudes sur nos positions. Augmenter le nombre des lignes ne ferait en définitive que diluer la qualité de notre stratégie et augmenterait le risque.” Typiquement, dans une stratégie de forte conviction, le taux de rotation des positions sera relativement faible, de l’ordre de 20% par an.

“Stock picking”

Amundi Funds-Polen Capital Global Growth sera exposé sur de très grands noms, avec une capitalisation moyenne qui dépasse les 400 milliards de dollars, en privilégiant les profils avec des rentabilités élevées, une absence d’endettement net, des marges stables ou croissantes, une croissance organique du chiffre d’affaires et des flux de trésorerie disponibles. “Nous recherchons des sociétés qui vont être globalement dominantes sur leur secteur d’activité”, indique notre interlocuteur. La gestion n’est pas impactée par les facteurs macroéconomiques ou par les résultats d’une élection, même celle de la présidence américaine. “Nous sommes conscients de la dynamique macroéconomique mais elle n’aura pas d’impact sur notre sélection de titres. Notre gestion a traversé plusieurs crises et de nombreux présidents sans que cela remette en question notre capacité à dégager une surperformance et à sélectionner des valeurs attractives.”

Jeff Mueller (Polen Capital):
Jeff Mueller (Polen Capital):

Tendances

“Nous allons naturellement être absents de profils très cycliques, avec aucune exposition sur les matières premières, les télécoms, l’énergie, les immobilières ou les bancaires”, souligne encore Jeff Mueller. Une fois l’univers réduit à 150 valeurs, les gestionnaires occupent le principal de leur temps à étudier leurs différentes positions. “Avoir un horizon aussi long permet de prendre son temps pour trouver les bonnes opportunités.”

Typiquement, les valeurs de forte conviction ont des pondérations plus importantes avec, par exemple, 8% exposé sur Microsoft et un portefeuille qui sera orienté sur les Etats-Unis (environ 60% des actifs sous gestion) et l’Europe (25%). “Nous sommes relativement peu exposés sur les pays émergents, à l’exception de deux positions sur Alibaba et Tencent, précise l’ancien marine. Mais au niveau du chiffre d’affaires dégagé par notre portefeuille, notre exposition sur cette région tourne davantage autour de 30%.”

Croissance séculaire

Au niveau sectoriel, la technologie, la consommation et la santé se taillent la part du lion. “Nous visons à nous exposer sur des tendances de croissance séculaire, comme le développement du commerce sur Internet, le cloud, les paiements digitaux ou la transition digitale. Nous ne détenons toutefois pas de groupes comme Netflix ou Tesla, en raison de résultats qui sont encore trop fluctuants.”

Cinq questions à Jeff Mueller

Trends-Tendances. Quel est votre meilleur souvenir en tant que gestionnaire ?

Jeff Mueller. Quitter le monde militaire pour venir dans le monde de la gestion est un souvenir qui m’est cher. Notre but est également de protéger nos clients et leur permettre d’être dans une meilleure situation financière sur le long terme. Dans nos locaux, nous avons un mur avec les photos de nos clients afin de nous rappeler constamment que nous travaillons dans le but de les défendre.

Quelle est la pire crise que vous ayez traversée à la tête d’Amundi Funds-Polen Capital Global Growth ?

Clairement, celle que nous avons connue en ce début d’année. Elle nous a toutefois permis de tester la solidité de notre processus d’investissement et a renforcé notre conviction dans les valeurs de notre portefeuille, dont bon nombre ont bénéficié d’une accélération de leur croissance suite à l’éclatement de la crise, comme Autodesk ou PayPal.

Quel a été votre meilleur investissement depuis que vous gérez le fonds ?

Adobe est aujourd’hui une des plus grosses lignes de notre stratégie (6,5% des actifs sous gestion), et c’est une conviction que nous maintenons depuis de nombreuses années par son exposition sur le développement des services sur le cloud qui représentent aujourd’hui 70% du chiffre d’affaires.

Et inversement, quel est le ” trade ” que vous auriez voulu ne pas avoir fait ?

Baidu, qui est certainement la pire décision d’investissement que nous ayons jamais faite. La direction a entrepris des diversifications qui ont entraîné une dégradation progressive des marges du groupe, tout en négligeant notre activité core. Nous avons revendu la position vers la fin 2016.

Quelle est l’action que vous préférez à l’heure actuelle dans votre portefeuille ? Et quelle est celle que vous ne détiendrez jamais ?

Je vais de nouveau citer Adobe, dont la croissance annualisée devrait rester extrêmement rapide durant les prochaines années. Et inversement, nous excluons une série de secteurs sur lesquels il est difficile de trouver des candidats qui répondent à nos critères de qualité.

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