L’anonymat fiscal et le brave investisseur

L’anonymat des investisseurs particuliers par rapport au fisc est en voie de disparition. La question n’est plus si, mais quand elle sera à ranger aux rayons des souvenirs. Cela signifie naturellement que les erreurs fiscales doivent être rectifiées. Mais pas que.

Pour les investisseurs actifs aussi, la prudence est de mise. Au risque de se voir imposer comme un spéculateur ou, pire, comme un investisseur professionnel. Car la facture fiscale d’une requalification peut être salée.

Ni vu, ni connu

Avec le régime du précompte mobilier libératoire, le fisc ne sait pas comment un contribuable investit. La banque assure toutes les obligations fiscales. Elle retient les précomptes mobiliers et les reverse à l’État. L’investisseur ne doit plus rien faire. Ce système n’a pas uniquement le mérite de la simplicité. Il empêche également le fisc de connaître le comportement financier de l’investisseur individuel.

L’anonymat fiscal est sous forte pression. Il est attaqué de toutes parts. La principale offensive a été parée pour l’instant. La suppression du caractère libératoire de précompte mobilier a en effet été annulée. D’autres tentatives ont cependant eu plus de succès. On peut penser à l’obligation de déclarer les assurances étrangères, le point de contact pour les comptes créé au sein de la Banque Nationale de Belgique, la suppression définitive des titres au porteur le 1er janvier 2014, etc. Au niveau international aussi, les avancées ne sont pas négligeables.

Investisseurs dans le champ de tir

Cette évolution inciterait le fraudeur le plus borné à régulariser sa situation. Mais les investisseurs qui sont bravement restés dans les limites de la loi fiscale doivent également craindre cet effritement de l’anonymat. Leurs faits et gestes entrent en effet dans le collimateur du fisc.

Seul l’investisseur en bon père de famille n’est pas imposé sur les plus-values sur actions, par exemple. Mais qu’est-ce qu’un bon père de famille ? Le fait que le contrôleur du fiscal a de plus en plus tendance à estimer que l’on a adopté un comportement spéculatif (imposé à 33 %). Un bon père de famille investit-il dans des contrats à terme, des options, de turbos ? Un bon père de famille peut-il de temps en temps vendre à terme ? Un bon père de famille procède-t-il a des achats et ventes fréquents ? Un bon père de famille investit-il 10, 40, 60 ou 100 % de son patrimoine en actions ? Qui peut le dire ? C’est une zone particulièrement grise. Et une grande source d’insécurité juridique.

Le raisonnement peut encore être étendu. La question ne concerne pas seulement le moment où un bon père de famille devient un spéculateur, mais aussi le moment où il devient un investisseur professionnel. Dans ce cas, les impôts peuvent atteindre 50 %.

L’effritement de l’anonymat comporte également un risque pour les ” braves” investisseurs. Un investisseur qui se trouve dans la zone à risques a quatre options. Il peut continuer comme si de rien était et prendre le risque fiscal, présenter son cas au service de ruling pour dissiper toute incertitude, confier son patrimoine en gestion discrétionnaire à son banquier ou investir en société. Le bon choix dépend de la situation particulière. Mais il est clair qu’il doit agir aujourd’hui. L’anonymat fiscal est en effet en passe d’être relégué au musée de l’archéologie fiscale. Un investisseur averti en vaut deux.

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Anton van Zantbeek

Avocat Rivus

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